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Les charognards [Sigurd]

 :: GARE
Les charognards [Sigurd] - Lun 22 Jan - 16:48
Adele Croce
lycans
lycans


Adele Croce
EFFIGIE : Saoirse Ronan
BAFOUILLES : 1246
PACTE : 30/11/2017
OSSATURE : 28 ans
CONTRAT : Célibataire, mariée à son métier, indisponibilité temporaire pour descente dans le tunnel de la drogue. C'est Alice au pays des merveilles avec des flingues.
BESOGNE : Dealer/Rabatteur (Agent du GOA infiltré)
FABLE : Adele sait tout ce qu'il y a à savoir des meutes et comment les éviter. Elle a de faibles notions sur l'existence des sorciers. Renifle et fuit les suceurs de sang avec efficacité. Des sirènes ? Faut quand même pas exagérer.
ÉCHINE : Wolfman (la version originale, bien entendu. Rien ne vaut les classiques)
PRESTIGE : Faiblarde pour les alphas, Hulk pour les humains. L'odorat d'une femme enceinte et la médaille d'or au quatre cents mètres haie. Au bas de l'alphabet grec et de la chaîne alimentaire, Adele n'est pas plus épaisse qu'un gros chien (bon d'accord, un très gros chien) Poule pondeuse pour sa race, c'est sympa les omegas. T'as raté quelques pages de l'histoire du féminisme, Dame Nature.
GANG : Nostro Regno. Tant qu'on gagne, on joue.
CREDIT : ava by me / sign by lazare
.Les Charognards.



" ... Un homme, blessé, multiples morceaux de verre dans le crâne, inconscient, la main cassée. Vraiment cassée. Derrière la gare, sur le parking, une mercedes berline, vieux modèle noir.
- Très bien madame, restez en l... "

Un peu blême, un peu bête, Eloise s'assure une dernière fois les numéros et fichiers copiés dans son téléphone. Après quoi elle remet celui avec lequel elle a passé l'appel à sa place, dans la poche de son partenaire profondément endormi. Son regard trop bleu, trop grand pour un tel spectacle; s'accroche à la vision grotesque d'une main pendue derrière son volant, bouillie de chair et d'os apparents raccrochée au bout de son poignet par miracle. Au travers d'une vitre en mille éclats, comme encastré dans le verre, un faciès méconnaissable repose - son souffle ténu fait des bulles dans le sang écoulé par filets épais de sa bouche. La symbolique presque religieuse de la main qui a fauté punie, du visage narcissique châtié, secoue sa déréalisation d'une vague tiède, réconfortante; au point qu'elle n'en hésite à pousser la métaphore, baisser son pantalon pour aller sectionner le premier coupable d'un coup de dents. Rebutée par la perspective, la consistance comme le goût, Eloise s'ébroue dans un frisson spastique. Une main spectrale rajuste ses gants de cuir avant de se river à la poignée, qu'elle tire vers elle d'un geste désespérément lent. Quand le cliquetis libérateur se fait entendre, Eloise reste là, encore quelques secondes. A contempler le vide et renifler le sang. A tenter de se souvenir comment fonctionne son propre corps.

D'une démarche chancelante, encapuchonnée comme une voleuse, Eloise essaye misérablement de s'éloigner de la voiture.
N'a t'elle pas fait trois petits pas, la pauvrette, qu'elle se tord en avant dans un haut le coeur pathétique. Serre les dents, plaque la main sur sa bouche, barrière infranchissable au flot de gerbe qui déferle à l'intérieur, trop plein d'ADN qu'elle ravale dans une déglutition furieuse. L'acide lui ronge l’œsophage en sens arrière, direction le point de départ. Le souvenir d'une émission du dimanche sur le risque des cancers de gorge si on souffre de reflux lui traverse le crâne, tout à coup; pliée en deux au milieu de son parking et le corps tremblant à ne plus savoir bouger. Elle tousse dans sa main, des gouttes de salive et de bile ramenant leurs effluves amères dans ses narines, masques passagers à la rouille d'hémoglobine. C'est en voulant baisser le bras qu'elle s'aperçoit seulement du morceau de verre niché dans sa paume, qu'elle vient de sceller à sa joue dans la manoeuvre. Dans un grondement mortuaire, Eloise arrache le morceau de ses différentes chairs, l'enfonce dans la poche de son cuir et se remet en route, le pas vacillant mais empressé par l'urgence.

Au loin, les sirènes bleues qui s'avancent ont arrêté quelques curieux dans le chemin vers leur voiture. Les charognards sont là, la mort ne vient pas seule. Les secours arrivés, c'est un attroupement qu'Eloise doit contourner, le nez rentré sous sa capuche, regard braqué sur ses pieds. A l'abris derrière un edifice de pierre, elle se laisse aller contre un mur, abattue d'épuisement; toute l'adrénaline qui s'envole, déjà, et lui fait l'effet d'un coup de massue sur le crâne. Dans un gémissement misérable, elle ferme les yeux à s'en fendre les paupières, Eloise; dans le vain espoir d'effacer les bruits de cartilage fendu, de chairs écrabouillées, et tous les mots échangés qui les ont conduits là. Tremblante, elle reprend corps avec la réalité de l'instant, regain de conscience suicidaire pour le lieu et l'heure. Quand elle ouvre les yeux, ils sont embués de larmes frêles, là où elle voudrait lâcher des torrents de douleur, des hurlements de détresse. Son attention reportée sur deux paumes vibrantes tournées vers le ciel comme une prière, elle voit enfin les tâches sombres sur le cuir; se prend jusqu'à l'étourdissement l'odeur du sang qui le recouvre.

Eloise refoule un sanglot, fouille dans ses poches avec l'énergie du désespoir, souille de fer une bouteille de SHA quand elle l'empoigne à pleine main pour la vider dans sa paume. Les doigts frottés les uns aux autres dans la contorsion des damnées au purgatoire, les larmes et la nouvelle salve de gerbe qui la menacent font glapir sa gorge, dans une suffocation passagère. L'obsession reprend le dessus, le sang qui la couvre l'obnubile.
Derrière son abri, la jeune fille se meurt en elle-même, dans le dos des badauds occupés à écouter les sirènes.


J'ai la connerie humaine, comme oraison funèbre.
Le regard des curieux, comme unique linceul.


Eloise résiste de peu à l'urgence de s'asperger le visage avec la solution d'alcool; même si elle les sent, là qui craquellent, les étincelles de sang. Juste là, sur sa joue droite. S'aperçoit dans un sursaut de conscience du danger déraisonnable de sa posture. Bondit hors de son antre factice avec la même spasticité pour chercher à rejoindre l'obscurité d'une nuit noire. Percute un tas de chair dans son élan et, tout à ses manquements de criminelle médiocre, se fend d'une excuse précipitée à son adresse.
Les erreurs confondantes auraient pu s'arrêter là, si dans un appel de détresse imbécile, désespéré, elle n'avait pas relevé le nez vers son importun gêneur. Sans même savoir pourquoi, sinon l'idée improbable et miraculeuse d'un voir un visage vaguement familier, un ami venu lui porter secours.
Vaguement familier, il l'est.
Amical, moins.

Elle voudrait s'enfuir mais il lui coupe la retraite en arrière; devant, il y a les sirènes et leur attroupement. De Charybde en Scylla. " Oh c'est pas vrai. gémit Eloise dans une gerbe d'horreur pure, spontanée. Et de chanceler à nouveau, pitoyable, au bord de la rupture. Je peux pas, je sais pas, je sais plus qui elle est, je sais plus qui je suis;
on ne peut pas être deux dans un corps déjà trop friable pour moi. Je sais plus qui c'est. Je sais plus comment on fait.
Je ne sais qu'être moi, et moi tu vas me buter. La flic, tu la buterais.
Vous la buteriez tous.


Tire-toi de là! "
Elle éructe, Adele, dans un ultime effort de contenance, de crédibilité.
Adele Croce
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Les charognards [Sigurd] - Lun 22 Jan - 22:53
Sigurd Strøm
lycans
lycans


Sigurd Strøm
EFFIGIE : charlie hunnam
BAFOUILLES : 77
PACTE : 19/01/2018
Les charognards [Sigurd] Tumblr_n5cf1sHMyD1qmdxjuo5_400

OSSATURE : 35 années grossièrement gerber sur le faciès, des décennies d'errance difficilement planquées par la pupille abyssale.
CONTRAT : Célibataire
BESOGNE : Toutou du professeur tu as été, toutou du professeur tu resteras... Limier pour l'Opus. Récemment nommé nounou de Jessy
FABLE : Connaissance accrue du surnaturel et des diverses espèces qui le peuplent, le tout, soigneusement enseigné par le Professeur fou des temps modernes.
ÉCHINE : Maudit et assujetti au clairon de la lune.
PRESTIGE : Force décuplé, haute capacité d'analyse, instinct meurtrier poussé à l'extrême, don offert sous le coup des entraînements d'une existence bercée dans le noyau de la pègre et de la violence .
GANG : Allégeance faite, il y'a de là des années, au Professeur.
CREDIT : Avatar / sign"@Adele Croce"
LES CHAROGNARDS

Adèle & Sigurd

Elle tombe, la nuit, se voile brumeux et cotonneux qui enveloppe lentement toute âme qui vive, ou pas. Elle tombe, sur le crépuscule qui s'évade, qui s'échappe de cette énième journée emprunte de fadeur, privée de toutes ses ferveurs d'été. Les touristes se mettent eux aussi à déguerpir. Plus lentement, encore. Au grand damn de Sigurd. Le loup qui n'aspire qu'à s'évader à son tour, à tomber, comme ses lumières frénétiques par un soleil capricieux. La masse vivante s'écroule dans une chaise plastique, aussi froide que l'air qui s'infiltre sinueusement entre les mèches de son crâne. Il inspecte son poignet, toujours cette même grimace contrariée déformant ses traits. Il est amoché, encore. Et fatigué, toujours. Les tâches s'accumulent, comme le sang qui noirci ses ongles et encrasse un peu plus ses mains. Il a cette odeur chimique qui l'accompagne, cette bile coincée dans le piff. Les journées s'avèrent trop longues et les nuits, trop sinueuses pour que le repos se fasse.

Comme l'oublie. Rare et occasionnel qu'il s'octroie, quand Jessy ne menace pas de s'enfoncer un ongle dans une prise. Ces instants rares dénués de toute frénésie, ou enfin, le souffle lourd se repose, un verre glacé par le froid, coincé entre les doigts. C'est alors qu'il observe, sans haine, sans rage, juste lasse, la foule qui se prélasse. Les couples s'enlaçant, se frictionnant l'épaule, les bras pour affronter le froid et le vent glacial qui s'insinue entre leurs écharpes. Il y'a des groupes, de femmes, d'hommes, parfois unisexe, parfois mélangés. Qui rient, clament, parlent fort, ou au contraire, se chuchotent bassesses et commentaires au creux de l'oreille. Des enfants, encapuchonnés jusqu'au nez, tenant la main d'une mère, l'épaule accroché à sa joue pour maintenir son téléphone, préoccupée par la conversation menée, nullement soucieuse des petites jambes qui trottinent pour tenir son rythme.

Il y'a aussi cette femme. Imposante. Bravant tout ce petit monde de son opulence. Disgracieuse et pourtant pleine d'humanité dans sa façon de vaincre le défit du vent sous sa jupe. L'étincelle éteinte de ses yeux frappent durement la rétine du blondin, s'essuyant sans grâce, la mousse qui colle à sa barbe. D'autant plus quand le regard s'accroche au sien -avant de s'effondrer dans une cascade de masse sur le trottoir. Alors que certains étirent un sourire goguenard, lui, reste de marbre. Sans réellement se soucier des éclairs accusateurs que lui lance la victime ébrouée sous sa montagne de chaire et de tissu. Il se contente de l'observer, de son empire de solitude, de sa table vide, de son unique chaise que seul lui occupe. Étrangement happé par le spectacle, sans ciller, il la regarde. Se démener, menant une course vaine contre elle-même pour s'extirper du trottoir, d'où des regards forcés de compassion, lui proposent de l'aide. Elle s'en fout -comme lui- de ce que les autres ont à lui proposer. Elle se débrouille, dans son handicap. Sifflant comme une chatte haineuse dès qu'une main s'octroie le droit de lui venir en aide. Elle finit par se redresser, après de longues minutes, ressenti comme un imperceptible infini. Sans même prendre la peine de remanier ses cheveux totalement défait dans la lutte. Elle charge. Comme un boeuf. En direction de Sigurd, toujours planté sur son cul, son verre reposant dans le creux chaleureux d'une main caillouteuse.

-]"J'espère que le spectacle t'a plu ! Connard d'obsédé !"

-"..."

-"C'est ça, tu fais moins le mariole d'un coup hein? T'as jamais vu une grosse de ta vie ? Pauv' type ! C'est qu'en plus d'avoir l'éveil d'un veau, t'as pas d'couilles !"

Elle continue, à gémir, gueuler, lui gerbant son mal-être, sa haine en pleine face. Sig lui, il essuie, garde le regard levé, rivé sur ses prunelles dont les rondeurs n'ont pu adoucir la fervente rage qui les anime. Et ça lui plait. Ca le réconforte. Alors qu'elle l'insulte, capte l'attention de la terrasse, de ses rares fumeurs, il s'observe, lui même, dans le reflet de cette impulsive marque de désolation. Dans ce geste de colère pur et dur, furieuse et démente, non pas contre lui, mais contre elle même, contre cette condition qui la fait se sentir jauger à chaque détour de quartier, s'offusquant de la moindre œillade. Parano maladive causée par le triste reflet que lui renvoie le miroir. Qui lui rappelle, chaque jour, que demain, ne sera pas mieux qu'hier, et peut être même pire qu'aujourd'hui, dans le tournant infernale que sa vie a pris depuis que tous, ont foutu le camps.

-"Un veau ?"

Comme réanimé, il articule, monotone, avant d'étirer, toujours aussi fadement, un bref rictus qui abasourdi, choque, calme la furie. Se demandant s'il l'insulte, ou s'avère encore plus con que soupçonné. Lui qui avait une apparence humaine alors qu'elle... Elle se sentait comme un veau.

Il aurait pu lui dire ce qu'il pensait, la rassurer dans son malheur, se sacrer bon samaritain le temps d'une petite poignet de minutes, afficher un visage compatissant ; peut être même faire semblant de s'intéresser à sa vie autant que ce qu'elle signifie. Mais subsiste... A quoi bon ? Personne ne jouait les gentils avec lui. Personne lui tendait la main quand il se pétait la gueule. Personne pour le regarder, ni même pour l'intimider. Pour l'insulter... Plus fréquemment, sans grande surprise. Elle était à plaindre, sans nulle doute. La médiocrité humaine la faisant évoluer comme bête de foire. Occultant l'humanité fragile qui vieillissait ses os. Naturellement. Doucement et pourtant, à une vitesse fulgurante. Lui. Il n'y avait pas droit. Pas de rédemption possible. Pas avant bon nombre de décennies. Alors, après une grande gifle de ses doigts rognés, de sa main boudinée, et d'une ultime flopée d'injures, elle disparu. Aussi promptement qu'elle fût arrivée.

Si tu veux, j'peux te montrer à quoi ça ressemble un monstre... un vrai.

Face à lui, les artères de la ville se déploient comme un tapis d'honneur. Vide. Enfin. Dépourvu de cette animosité grouillante. La paix. Simplement. La tranquillité d'une nuit hivernale. Avec ses ombres malines qui s'étirent fugacement, avant de disparaître. Sans même se soucier d'où le mènent réellement ses pas, il arpente, se mouve entre les rues, inspirant à la dérision. Pour une fois. Lui, et son ombre. Pas l'ombre de Jessy où d'une proie. Juste la sienne. Et sa clope coincée entre ses lippes. Sa veste en cuir remontée jusque sous le menton. Les mains fourrées dans les poches, comme habitude, cachant la vérité de son espèce, la virulence de ses membres, le fracas qui parsème ses phalanges. Puis des sirènes, d'abord au loin puis se rapprochant furieusement, projetant leurs gyrophares contre les pierres de la ville. Sans ralentir, il avance. Le crâne enfoncé dans sa capuche, quelques mètres le séparent de la gare. Il reconnait, se rappelle son arrivée. Puis celle de Blondie. Les questions avortés qu'il s'est posé sur sa venue en ville, sur les projets du mentor évanoui. Ca lui trotte dans le crâne, un moment. Le temps de se rallumer une clope et de retourner sur la route en sens inverse. Tournant en rond. Rapidement. Comme un lion en cage.

Sur le retour, le bruit des sirènes lui revient, en plus d'un parfum.. Ferreux et nauséabonde. Celui du sang qui se coagule. La peur l'accompagne, s'ensuivant d'un souffle rapide, d'un coeur qui crépite. Le flair du loup n'a le temps de situer l'odeur, quand au détour d'une rue, la frêle créature apeurée se heurte à son torse. Ou plutôt se frappe. Se fracasse. Provoquant une explosion des sens qui le font grimacer, se raidir. Les lourdes phalanges, par réflexe, bloquent le missile vivant dans sa course, enserre ses bras avec une force incontrôlée. L'affolement de sa brebis se fait cependant plus rapide, et s'évanoui, comme de la flotte retenu entre ses doigts. Mécaniquement, il se retourne dans sa direction et alors qu'elle fait volte face, il la voit. Le visage décomposé, émietté par l'effroi. L'hystérie fait germer des rides sur un visage qu'il a connu, pourtant, lisse, comparable au porcelaine. La lueur bleutée des sirènes se fait plus présente, au point de colorer les traits qui le toisent, le bousculent, le prient hargneusement de se pousser, de dégager. Mais il reste planté là, la jaugeant avec cet imperceptible lenteur. Une lenteur de fauve, jugeant sa proie, des pieds à la tête. Pieds et tête tachetés, d'un cramoisie sanglant. Sa paume vient bloquer l'espace étroit entre son objectif d'évasion et lui. Lui barrant la route sans se formaliser de la familiarité du ton. Presque habitué à ce qu'on le traite comme un cabot. Comme ce qu'il est réellement.

-"Semblerait que tu t'sois attirée des ennuis, petite."

Qu'il balance, mi rieur, mi autoritaire, jetant un regard par dessus l'épaule menue d'où surgi une sirène stridente. Première phrase contenant plus de trois syllabe de la journée. A tel point que même sa voix lui semble étrangère. Son italien a du mal à s'ajuster à l'accent qui lui colle au palais, si bien qu'il a un doute sur sa capacité à se faire comprendre.

-"Et si tu me donnais une bonne raison de te laisser filer ? P't'être que je pourrais t'aider ? Bien qu'à ce que je sache... t'es plutôt rapide dans ton genre"

Cette fois, c'est à son tour de la fixer, toute trace rieuse ayant désertée ses traits. Les sirènes semblant toujours plus proche. Le temps s'effrite tout comme la silhouette qui lui fait face.


MR. CHAOTIK


Sigurd Strøm
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Les charognards [Sigurd] - Mar 23 Jan - 13:58
Adele Croce
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Adele Croce
EFFIGIE : Saoirse Ronan
BAFOUILLES : 1246
PACTE : 30/11/2017
OSSATURE : 28 ans
CONTRAT : Célibataire, mariée à son métier, indisponibilité temporaire pour descente dans le tunnel de la drogue. C'est Alice au pays des merveilles avec des flingues.
BESOGNE : Dealer/Rabatteur (Agent du GOA infiltré)
FABLE : Adele sait tout ce qu'il y a à savoir des meutes et comment les éviter. Elle a de faibles notions sur l'existence des sorciers. Renifle et fuit les suceurs de sang avec efficacité. Des sirènes ? Faut quand même pas exagérer.
ÉCHINE : Wolfman (la version originale, bien entendu. Rien ne vaut les classiques)
PRESTIGE : Faiblarde pour les alphas, Hulk pour les humains. L'odorat d'une femme enceinte et la médaille d'or au quatre cents mètres haie. Au bas de l'alphabet grec et de la chaîne alimentaire, Adele n'est pas plus épaisse qu'un gros chien (bon d'accord, un très gros chien) Poule pondeuse pour sa race, c'est sympa les omegas. T'as raté quelques pages de l'histoire du féminisme, Dame Nature.
GANG : Nostro Regno. Tant qu'on gagne, on joue.
CREDIT : ava by me / sign by lazare
.Les Charognards.



Non. Non.
Il l'a reconnue. Elle la voit dans ses yeux, cette vague étincelle d'absence quand la mémoire remet un nom, au pire un instant sur un visage. Parce qu'elle est reconnaissable, Adele; met un foutu point d'honneur à se fendre d'un compliment ou d'une remarque, d'un surnom pour tout le monde. Un réflexe venu de ses ventes qu'elle pratique depuis bien douze ans, maintenant.
Elle en rirait. Elle en rirait à gorge déployée, si elle n'était pas aussi sidérée.

Dans une autorité narquoise, le plus dangereux des vautours gravitant autour des cadavres fond sur elle, en son refus absurde à la laisser battre en retraite. Pas sans avoir réussi à extriper quelque chose de cette charogne, on ne sait trop quoi. Sans doute ne doit-il pas le savoir lui-même, si on en croit les phrases génériques et les œillades incertaines qu'il dépose sur son macabre visage. Dans le doute, extorquer d'abord et réfléchir ensuite. Ne tenant en elle-même plus que par miracle, Eloise s'étouffe dans ce refus amoral. Manque de peu de lui visser le crâne pour le jeter contre un mur, dans la conscience miraculeuse du monde autour.

Putain.
Putain.
Pourtant, je t'aimais presque bien.


***


- Adele -- Sigurd - Fais comme chez toi, y a de la bière dans le frigo, et fais pas attention au bordel je suis dans les livres Feng shui en ce moment.

Dans la routine légère d'une scène à la banalité camarade, les corps s'orchestrent entre les meubles et le bordel méticuleusement cultivé d'Adele. Appartement impersonnel digne de la vitrine d'un magasin de mur, ces lieux de vie auxquels on s'emploie à donner un peu de chaleur malgré notre indifférence manifeste pour les objets personnels. Si on fait exception des centaines de boîtes de dvds éparpillés comme des œufs de pâques entre les tables et les étagères
Dans une petite cuisine ouverte, un gros sac de drogue attend d'être pesé par une balance dernier cri refusant depuis quelques minutes d'afficher son résultat digital; à vous faire regretter les balances manuelles et les poids en cuivre.

Campée sur un tabouret de bar au dessus de son appareil obstiné, le menton dans une main et l'autre occupée à appuyer sur l'unique touche à sa disposition par intervalle réguliers, Adele contemple son hôte d'œillades fugaces, pensives. Un peu insistante sans être intrusive, elle dessine ses traits éclairés par le soleil timide de l'automne romain, se demande l'espace d'une seconde s'il a fait exprès de choisir le fauteuil le plus inconfortable de son salon. Lui sourit dans un sympathie parfaitement inoffensive quand il se sent obligé de tourner les yeux vers le regard qu'elle s'obstine à faire patienter sur lui. Il a les yeux des chiens à la fenêtre. Ceux qui regardent passer les voitures dans l'espoir peut-être, de trouver au défilé perpétuel, une notion du temps qui passe. Un animal capable d'attendre des heures immobile sans déroger à sa mission contemplative mais sans jamais s'endormir, prêt à contracter tous ses muscles d'un seul et même bond au premier signe de mouvement. Y a quelque chose d'un peu triste chez ce trentenaire barbu qui synthétise de la drogue et la traite comme un passe temps, comme si c'était du foot ou du piano. L'air des gens dont la vie s'est arrêtée quelque part et personne ne saurait dire vraiment où; qui décrivent des cercles concentriques et perpétuels depuis, à défaut d'un endroit où se rendre.

Mais elle se trompe peut-être; sans doute qu'elle extrapole, Adele. Qu'à force de croupir parmi les criminels, elle en oublie la distance prudente et les consignes restrictives à tout attachement, s'adonne plutôt à des identifications contraires. Pour se sentir moins seule, pour se sentir moins folle. Trouver un vague semblant d'humanité dans la routine synthétique des fournisseurs qui fournissent et des revendeurs qui revendent. Excuser les passages à tabac auxquels s'adonnent ses nouveaux amis en se distant qu'ils n'ont pas dû avoir une enfance facile...

Pourtant elle est douée avec les gens, Adele : c'est pour ça qu'elle a fait se métier. Tu crois qu'on peut développer des capacités, simplement parce qu'on se les est inventées, Blondin ? Eloise n'est pas particulièrement douée avec les gens; trop envahie par ses névroses, ses angoisses, pour les juger sans la rigidité morale de ses cases salutaires. La force de persuasion du cerveau humain serait-elle si forte, qu'on en vienne à exceller dans des domaines de médiocrité simplement parce qu'on s'est menti assez longtemps pour y parvenir. Donne-moi ton avis scientifique éclairé.

Enfin, la balance daigne afficher un résultat cohérent, dans l'alarme sonore d'un bip victorieux, qui la fait bondir hors de sa contemplation pensive. Satisfaite du résultat, Adele repousse la drogue du capricieux appareil, fendue d'un commentaire appréciateur.

" T'es un homme honnête, Blondin. s'autorise t'elle avec humour, jaugeant les coupures que son bref collaborateur a reçues pour recompter lui-même, un œil interrogateur à son adresse. Se contente de l'approbation d'un silence pour sourire, satisfaite de l'efficacité de l'échange malgré quelques soucis techniques. Pas d'injure ni effusions de sang, alors ? elle commente sans pudeur, Adele, presque une pointe de déception rieuse dans la voix quand elle descend de son promontoire, avec félinité. Moi qui avais enfin pensé à ménager mes plannings pour ce genre de perte de temps. elle soupire en allant s'affaler sur le canapé, ordinateur jeté sur ses guiboles tendues jusqu'à la table basse, à la recherche de la première idiotie audio visuelle pour lui occuper sa plage de temps économisée.  Ben fais comme chez toi écoute. Finis ta bière; tranquille. Je te proposerais bien un cinq à sept mais je suis pas douchée.

Laisse planer le doute sur le degré exact de cette remarque sans se fendre d'une précision, jamais; l'attention déjà reportée sur le générique de son épisode qui se lance dans une indifférence soudaine et parfaite à ce que l'autre peut faire.


***


" C'est pas intéressant. Ca te va comme raison ? "
Rien que tu n'aies déjà dû voir un million de fois, déjà. La triste histoire de l'Humanité toujours répétée dans nos milieux de débauche, des tas de trucs que tu as déjà dû entendre et autant d'autres dont tu es toi-même coupable. Aucun son que tu n'as pas écouté ni même produit, aucune odeur qui n'a déjà imprégné mille fois tes narines. Rien de nouveau sous le soleil cendré de la médiocrité humaine; certainement pas quelque chose qui vaut de me bousiller dans une curiosité inutile, irrationnelle - au seul nom de l'Ennui.

Elle le flingue, Eloise.
Moins de la verve habituelle, la rage insolente de ses jeunes années cette fois; que d'un désespoir jeté en ondes sismiques de son corps pour être répercutées sur les corps des autres. Le tremblement fébrile se fait vibration pleine, il y a des larmes chevrotantes dans la voix qu'elle tente désespérément de tenir égale, vaillante. La douleur qui lui gerbe par tous les pores de la peau et son cœur qui cogne comme un sourd sur ses parois de verre, affolé de sentir l'asphyxie venir. Elle n'a plus la force; ni de tenir, tant que ça lui semble un miracle de ne pas sentir toutes les cellules de son corps se disloquer les unes aux autres en tas de cendres; ni de se battre, au point d'être capable de renoncer à tout ce qu'elle a seulement pour se voir ouvrir le passage : le salut, la tranquillité dans l'explosion de sa douleur. Un endroit où hurler. " Le vrai sensas' est derrière alors va profiter du spectacle, ou retourne à ta petite vie mais laisse-moi passer. Ses derniers efforts de contenance s'écroulent, quand elle abat ses mains sur le torse qui la domine dans une percussion risible, inutile. Une, puis deux fois, dans l'énergie du désespoir. Pour le pousser hors de là, sans le moindre résultat. Allez. Allez, merde ! " l'échec ne déclenche plus les réflexes habituels de sa rage interne; ne fait qu'ouvrir les vannes de sanglots d'enfant abandonnique. La cage secouée par un chaos informe de hoquet, de protestations et de larmes, Eloise accroche la veste qu'elle repoussait de deux poings aberrants, bien plus intrusifs que ses modestes œillades. Le tire et le repousse, et le tire encore, jusqu'au mur. L'horreur de sa soirée et la sensation d'y étouffer achèvent d'assassiner le rationnel en elle, quand une bouffée de haine implose hors de sa bouche; supplique gémie sur un cri d'outre-tombe, dans la percussion d'une incompréhension insoutenable. " Mais qu'est ce que tu veux, à la fin ?! Qu'est ce que vous voulez tous ?! Et les minutes qui s'égrainaient cessent, l'espace d'une fraction de seconde. Un instant infime en suspens dans les horreurs du monde. Dans ses grands yeux écarquillés, dans l'imploration sincère, presque pieuse, d'un visage déconfit prêt à tout pour un vague semblant de réponse. L'absolue naïveté qu'est le dernier retranchement de l'Homme, à chercher des pourquoi quand les comment sont insolubles. Quand le gratuit devient invivable. Sur leurs visages confrontés dans la lumières bleue de ses sirènes, le bruit étouffée du monde alentours, l'iris clair se meurt d'épuisement dans un murmure en chant de cygne. Est-ce que t'en as la moindre idée, au moins ?

On les hèle, flinguant l'ersatz d'instant de grâce; badaud alerté par la rixe en mal de justice, ses pitoyables désirs de sauveur éveillés par la symbolique sonore et luminaire des secours publics. Eloise entend les pas qui s'approchent derrière elle, l'obligeant à baisser le visage sous sa capuche dans un dernier instinct de conservation; secouée d'un nouveau sanglot qu'elle essuie de sa manche frottée sur son visage maladif avec rage, elle reflue d'une voix inhumaine, chevrotante, entre ses mâchoires rivées l'une à l'autre. Je te payerai. Je te payerai, d'accord ? "

Ca c'est une raison que ton âme comprendra.

Adele Croce
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Les charognards [Sigurd] - Sam 3 Fév - 17:26
Sigurd Strøm
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OSSATURE : 35 années grossièrement gerber sur le faciès, des décennies d'errance difficilement planquées par la pupille abyssale.
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BESOGNE : Toutou du professeur tu as été, toutou du professeur tu resteras... Limier pour l'Opus. Récemment nommé nounou de Jessy
FABLE : Connaissance accrue du surnaturel et des diverses espèces qui le peuplent, le tout, soigneusement enseigné par le Professeur fou des temps modernes.
ÉCHINE : Maudit et assujetti au clairon de la lune.
PRESTIGE : Force décuplé, haute capacité d'analyse, instinct meurtrier poussé à l'extrême, don offert sous le coup des entraînements d'une existence bercée dans le noyau de la pègre et de la violence .
GANG : Allégeance faite, il y'a de là des années, au Professeur.
CREDIT : Avatar / sign"@Adele Croce"
LES CHAROGNARDS

Adèle & Sigurd

Ca tonne. Ca frappe. Ca ricoche sur la masse norvégienne. Le torse puissant accueille, presque avec plaisir, les poings désespérés qui le martèlent. Il reste de marbre, le géant. La domine de sa taille, de sa stature. L'ossature fière et altière, du monstre de glace. Il tente de déchiffrer. De saisir. Mais toutes ces odeurs, tout ces parfums, se mélangent. Bouillonnent dans son crâne, saturent ses narines et sa gorge. Une pille d'émotions ; un supernova, un shoot d'adrénaline.  C'est qu'elle le transpire tellement, que ça l'éclabousse. Ca le fait vaguement chanceler, à l'intérieur. Pour ne pas dire que les ondes viennent jusqu'à flirter avec ses poumons. Ca lui rappelle, successivement, ses jeunes années. L'âge innocent brisé. Le premier meurtre. La première gorge tranchée. La première marre de sang à ses pieds. Collant et tâchant ses semelles, ses doigts, son menton dont la barbe n'avait eu le temps de germer. L'effroi de l'acte irréparable, la trouille, qui soulève l'estomac. Mais surtout, les genoux qui fléchissent, et tout le reste qui se met à chanceler. C'est la perplexité qui l'emporte, d'ainsi se comparer, se mesurer. Comme si la quête de reconnaissance s'étalait et fragmentait sa journée jusqu'à envahir sa nuit. Alors, aussi hébété qu'aux prises de l'admiration pour ces pulsions -presque humaines-, il se nourrit du spectacle. Joyau de l'humanité. Laissant l'espace désolé s'emplir de ce que son cœur a oublié, depuis des années, de ressentir.

Parce qu'elle, elle a ces airs de gamines effrayées. De celles prêtes à se jeter du haut d’un immeuble. Un pied dans le vide, l’autre campé sur la rambarde. Vacillante. Jouant à un concours d’agilité sur la longue corde qui la rattache fébrilement à la raison. Il la voit. Sous ses pieds. Tendue, prête à l’oublier dans ses méandres. Alors qu’elle suinte. La peur. L’angoisse. La rage. Des perles salines grouillent et gribouillent son faciès. Dégoulinantes, les pupilles gonflées à éclater lui balancent ses éclairs, sa haine -familièrement, comme il en reçoit si souvent -trop souvent. Elle lui dégobille ouvertement son mépris avec une singularité nouvelle. Loin de celle octroyée lors d’un échange bref, peu loquace, courtois, mais sans plus. Sans plus d’émotions, ni d’intrusions. Elle, si platoniquement banale, si fébrilement seule, éperdue dans des magouilles que Sig, n’a jamais vraiment pris le temps de raisonner dans le coin de son crâne. Pourquoi la drogue ? Pourquoi cette malédiction pourrissant ta moelle ?Comment une apparence aussi fragile peut refermer autant de... shit. Elle a l’air crevante de normalité, la gueule enfarinée, couvant un calme passé. Passé de longues dates, visiblement. Jusqu’à ce soir. Ca lui rappelle, bizarrement, des accords faits de violences, de crissements déséquilibrants, de hurlements de guitares. Il se souvient, des sensations lorsque le tourne disque susurre le déchirement de ses héros, ses chanteurs élevés dans leur désespoir, le dépréciation ironique du monde de la musique. Parce qu’Adèle, elle chante. Aux oreilles du loup, elle fredonne de ses suppliques, de ses cris. De la brusquerie de ses os, grelottant à s’en briser sous sa chaire. Elle lui murmure une symphonie qui lui rappelle, dans son habit macabre, ce qu'est la vie dépeinte de toute hypocrisie. Il sent ses veines gonfler d’une euphorie étrange, celle qui lui rappelle l’ivresse du premier baiser, le temps décisive et enivrant du geste qui fera que tout devra s'écrouler, ou non. Le poids du choix. Fuir, ou pas. Continuer à l'observer s'effondrer, là, maintenant, sous ses yeux. Ou bien, dans une envolée onirique, vaguement héroïque, la laisser à sa fuite. Ca, ça serait une première. Un début effervescent. Peut être même revigorant, pour un spectre vaseux. La sensation du bien, éloignant le mal. Faire semblant d’être humain, d’en avoir quelque chose à foutre. Être autre chose qu’un brave cerbère loyal à son diable. D’être quelqu’un.
A compté qu’il sache le faire.

Le dos creuse les pierres délabrées de la ruelle. Son souffle s'échappe brusquement de sa gorge sous la véhémence du coup. Le regard écarquillé, plus d'admiration malsaine, que de réelle stupeur, il la laisse hurler son ultime défaite. Esclaffer vaillamment sa désolation en explosant de supplice, à quelques centimètres de son visage. Cette fois, en plus de la voir, il la sent. Vibrer contre son corps. Ses doigts tordent le cuir de sa veste. A croire qu'elle pourrait la déchirer du bout de leur pulpe. Gravant son emprunte dans la déformation du tissu.

Je te payerai, qu'elle lui balance, le rabaissant un peu plus. Bassesse à hauteur de son espèce. Vulgaire cabot errant dont motivation, rime singulièrement avec perdition. L'argent ça tourne. Ca paie les factures, le confort. Besoin élémentaire, basique, alimentaire. Pour quelqu'un qui a une vie basique. Des besoins factices. J'ai une gueule a en avoir quelque chose à foutre du fric ?  Ca lui donne presque envie de rire. Ca le bouscule dans son ego. C'est amer, qu’il soupir. Plus féroce, qu'il fini par grogner.

"-J’me ferais bien plus de pognon en ramenant ta tête sur la table de l'Opus, liten jente.-"

C'est pas de ton fric dont j'ai besoin,  ni même de ton cadavre.. j'veux que tu peignes avec tes doigts dégueulasses les murs de cette putain de nuit, de cette putain de vie... parce qu'y'a qu'ça qui m'fasse vivre moi, les trucs dégueulassent, que personne veut voir.

"-C’est pas compliqué d’être coopérative, d'me donner une vraie raison de te laisser tranquille…"

Une raison à l'intérêt que t'éveil en moi...j'sais pas comment.

Des pas viennent ponctuer ses mots. Ca talonne contre les dalles. Les deux protagonistes s'affaissent, imperceptiblement pour l'un, un peu moins, pour l'autre. L'enjeux de la vie galope en leur direction. De sa vie. A elle. Il lui prend le bras, fermement, afin de l'empêcher de se soustraire à ses phalanges. Mécaniquement. Sans raison valable ni plus d'objection. Elle gagne. Sur ce coup là. Il dirige ses pas hors de la ruelle, lui accorde un bref répit,  l’entraîne d'un pas vif dans un semblant de sûreté. Loin des flashs, des sirènes. Du bruit. De l'angoisse. Il dévale les artères du quartier, l'entraîne jusqu'au porche d'une église. Lieu aussi oublié que sacré, surtout à cette heure. Tu veux te repentir ? Il la plaque contre l'immense porte en bois. Hésite une dernière fois. S'en servir comme défouloir, où la laisser retourner à ses tourments. Barrant ses lèvres de l'index, il la soumet brutalement au silence. Fatigué de ses cris. Brusquement, lasse de ses larmes. Mime de tendre l'oreille avant d'opiner du menton. Maintenant, c’est entre elle et lui. Elle, et sa détresse juxtaposée à sa haine. Et lui, dévorer par son insoutenable indécision, incapable de se jauger lui-même sur ses émotions. Le crâne fucké par ses années démunies de raison. De toute intuition. Bête machinale habituée à obéir aux ordres, à tuer. A survivre, pour mieux tuer. Il la relâche, sans vraiment prendre la peine de se reculer, éprouvant un plaisir successif à voir la patience s’étioler sous l’azure de ses yeux. Ca le surprend lui même. Pour une fois, la sensation de détenir un semblant de contrôle.

-T’as deux options… me cogner. Ou me raconter le merdier dans lequel tu t’es foutue.

J'veux surtout savoir si j'vais recevoir un contrat sur ta tête, demain matin, quand t'auras probablement quittée la ville.Le regard plissé, il daigne se défaire. Lui rendre l’espace vitale exigée. Pour respirer. Pour ne pas lui cracher au visage trop facilement, surtout. Et il ne peut pas s’empêcher, Sig, d’avoir un coin de la pupille qui luit. Par curiosité. Par contentement, de ne plus respirer seul, l’air nauséabonde et humide de la ville. De ce bitume froid qui lui donne la nausée. Si jusqu'à maintenant il n'avait su comprendre, lui même, ses propres motivations, à cet instant tout lui parait brusquement plus clair. Une parenthèse à l'errance. Une brève parenthèse à la solitude. Au devoir. Au final, elle ne signifie ni plus, ni moins. Une dévire jointe, celle qui dort depuis des décennies et celle, qui s'établi face à lui.


MR. CHAOTIK


Sigurd Strøm
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Les charognards [Sigurd] - Dim 4 Fév - 9:34
Adele Croce
lycans
lycans


Adele Croce
EFFIGIE : Saoirse Ronan
BAFOUILLES : 1246
PACTE : 30/11/2017
OSSATURE : 28 ans
CONTRAT : Célibataire, mariée à son métier, indisponibilité temporaire pour descente dans le tunnel de la drogue. C'est Alice au pays des merveilles avec des flingues.
BESOGNE : Dealer/Rabatteur (Agent du GOA infiltré)
FABLE : Adele sait tout ce qu'il y a à savoir des meutes et comment les éviter. Elle a de faibles notions sur l'existence des sorciers. Renifle et fuit les suceurs de sang avec efficacité. Des sirènes ? Faut quand même pas exagérer.
ÉCHINE : Wolfman (la version originale, bien entendu. Rien ne vaut les classiques)
PRESTIGE : Faiblarde pour les alphas, Hulk pour les humains. L'odorat d'une femme enceinte et la médaille d'or au quatre cents mètres haie. Au bas de l'alphabet grec et de la chaîne alimentaire, Adele n'est pas plus épaisse qu'un gros chien (bon d'accord, un très gros chien) Poule pondeuse pour sa race, c'est sympa les omegas. T'as raté quelques pages de l'histoire du féminisme, Dame Nature.
GANG : Nostro Regno. Tant qu'on gagne, on joue.
CREDIT : ava by me / sign by lazare
.Les Charognards.


" Ma femme Eloise. Ma femme! Pour notre anniversaire de mariage, espèce de garce. T'as vraiment envie d'aller sur ce terrain-là ?
- Tu te comportes comme si rien nous avait menés là. Et tu crois que je vais me faire avoir par une technique de manipulation aussi minable ? Tu as violé une fille! Sans doute que tu la violes encore. Et t'as menacé ma vie! "


Any dolt with half a brain can see that humankind has gone insane
To the point where I don’t know if I’ll upset the status quo
If I throw poison in the water main
Listen close to everybody’s heart and hear that breaking sound
Hopes and dreams are shattering apart and crashing to the ground


Quel opus ? L'opus de qui ? De quoi est-ce que tu parles ?

Une menace, à en croire la dureté des propos comme la férocité du ton qui les largue. Brève exaspération de l’autre, à se voir affublé de désirs aussi barbares, lui qui doit briller par des desseins bien plus beaux et sombres, plus complexes ; plus affligeants encore. Quoi, ça t’amuse déjà plus ?

Eloise n'a ni l'énergie ni l'esprit à se poser la question, ne retiendra de cette phrase que sa conclusion primaire et intuitive, l'intérêt du gain de la bête humaine avant toute humanité fondamentale. Et si ce n'est l'argent, c'est un autre gain. Lisible et prévisible, dans ce regard qui la toise, de cette avidité étrange dont toute considération est absente. Juste une vague lueur d'incompréhension qui vient de temps en temps colorer les étincelles morbides de ces yeux trop bleus pour contenir un tel cynisme. La prunelle luisante d’un espoir aberrant au milieu de son horreur. Azur contre azur, l'un envoie des suppliques à l'autre qui reste sourd, bouteilles échouées dans la mer grise de ses prunelles indéchiffrables. Pas de rides d'inquiétude au bord des iris clairs, pas une torsion de compassion à ses lèvres débitant des absurdités navrantes. Un charognard parmi les autres, à lui faire remettre en question, désormais, l'existence de toute autre espèce en ce bas monde. Tous ces hommes et toutes ces femmes, dans les sillons les plus tortueux de la pègre, affubles de ce regard, cet éternel regard - l'imploration cruelle et absorbante pour une dernière distraction dans l'ennui pathétique de leurs existences. Des chiens qui s'entretuent pour l'os le plus gros, la moelle la plus savoureuse. La seule différence à toutes ces autres soirées placées sous le signe de l’accablement, interminables et innombrables, c'est que la charogne n'est plus un camé en manque ou un associé sans prudence; c'est elle - elle et sa pauvre carcasse défaite sous l'oeil aiguisé du rapace qui la surplombe. Eloise supplante le dédain pour la haine, dépasse et trépasse ses rejets méprisants pour des se noyer dans des gerbes de dégoût profond. La colère de l'Homme déçu, l'ire de l'enfant trahie. Trahie par les réalités de ce monde, à taper dans les murs gris pour espérer y mettre des couleurs.
Le rouge. La vie.
La vie au fond de tes prunelles absentes.

Coopérative. Le coeur d'Eloise s'accélère, son bras se bande. Poing fermé, minuscule et létal, à s'en blanchir les phalanges, imprimer des demies lunes sous le cuir rogné de son gant. Coopérative ? Elle tait le grondement de bête qui la menace, la demoiselle, s'en flingue la gorge pour ne pas l'avertir. Coopérative, espèce de connard ? Je vais te crever, je vais te saigner comme un porc toi aussi et on verra si je suis coopérative.

Une main l'enserre, un bras la tire, un corps la pousse en avant. L'élan imbécile tue pour quelques secondes les éclairs meurtriers qui lui vrillaient le crâne. Elle galope sans comprendre, Eloise, enchaînée à un boulet qui court plus vite qu'elle. Un pied ripe, son cerveau dérape. Se perd dans la dégringolade d'une conscience ce plus en plus flinguée par la douleur.

Guidée à l'aveugle, ses yeux quittent la vision inutile et hostile de l'épaule qui la trimbale, son museau pointe vers le ciel à la recherche d'une étoile, dans un ciel d'encre. Un ciel banal pour un air à peine frais, gorgé d'humidité, de tâches moins noires au milieu du noir. Les reflets d'une lune malingre éclairant à peine le voile des cumulus gorgés; plein à fuir sans éclater, de cette humidité constante. Elle peut les sentir, les rares gouttes condensées dans l'air, brûlures éparses sur son visage blafard, dans ses yeux perdus.
Dans la frénétique cavalcade n'accélérant que trop peu son coeur, effort à peine quémandé à ses jambes trop heureuses de courir, elle se souvient, Eloise. Du galop furieux, douloureux et vivant, du paliptant minuscule qui dérapait comme un petit cheval quand elle dévalait les rues de Londres, enfant. Dans la course folle et puérile sous les torrents, à suivre des bâtons de bois dans les rivières des trottoirs. Se remémore la majestueuse énormité de Londres, les artères démesurées que forment ses boulevards; là, à courir sans effort dans un dédale de capillaire à faire pâlir les fantasmes des galeries romaines. Juste un tapis de béton gris noir, cerclé de bâtiments cubiques et fonctionnels.

Et elle étouffe, encore, Eloise. Dans sa détresse, sa fatigue et son horreur, elle sent les torrents de larmes lui reprendre la poitrine et la gorge, embuer ses prunelles vides; à masquer, enfin, la laideur du béton et des hommes, celles des rues où elle cavalcade et celle de l'épaule qui l’y traîne.
Elle voudrait qu'on l'aide; qu'on la sauve et qu'on la berce. Qu'on dépose le vulgaire chargement qui déborde et lui échappe des mains à ses pieds, et qu'on la porte dans un lit pour y mourir.

Son dos percute une porte, à faire tonner les gonds dans un bruit d'orage. Le choc répand une onde de chaleur dans tout son corps ; lui relève la tête, et c'est une croix qui fend le ciel moche, juste au bout de son museau pâle. Un rire jaune, spectral, lui secoue la gorge, coupée par l'intrusion outrancière d'un doigt contre ses lèvres. Dans l'orgueil inutile d'une combativité en débris sales, Eloise flingue son agresseur d'un regard noir, gerbe épuisée de haine. Touche-moi. Vas-y. Touche-moi encore. Touche-moi maintenant. Tu verras. Tu verras. Il s'en dispense, sans fendre la proximité étreignant leurs deux corps, dans une parade presque tendre. Elle sent son souffle sur son visage quand il lui parle, à peine hachuré par cette course dérisoire; tranché de bière et de tabac, ces accessoires d'humanité impensable, qu'elle hume une seconde à s'en faire péter la panse. Pour échapper, un instant seulement, aux relents bestiaux de chair et de sang, dont elle se sent couverte jusqu'à la noyade.

Oh ne me tente pas.
Elle le tuerait. Elle le tuerait ici et maintenant si toute combativité n'avait pas quitté son corps. Egrainée comme des miettes dans son sillage, après une course de piètres secondes.

" De quel merdier tu parles ? elle s'arrache, la belle; dans une éructation inhumaine, une voix presque synthétisée dans la perte du sol, de la réalité avec. Mon seul merdier ici, c'est toi."

Toi qui m'empêches, toi qui me barres la route et me séquestres.
Toi sans lequel je serais déjà rentrée chez moi.
Sans lequel j'avais une parfaite solution  mon problème.


I cannot believe my eyes how the world’s filled with filth and lies
But it’s plain to see, evil inside of me
Is on the rise


Ernest est gardien de zoo – du moins c’est ce qu’il dit toujours quand on le lui demande.
Ses journées sont rythmées par le grésillement des néons et les coups de son bâton sur les barreaux des cages. Gardien, en effet – gardien d’une porte entre les mondes, main dévouée à garder le suppôt de Satan loin de la mère et l’enfant. Ernest a de l’amour pour le genre humain et de la haine pour les monstres ; un million d’attentions et de compliments qui lui valent le respect de ses collègues, plus encore de façons de rosser les animaux de foire dont il est le garant. Il les aime combattifs, femelles pétries de la hargne hystérique propre à la matrice qui les souille ;  mâles drapés dans l’orgueil ridicule de l’organe fier entre leurs jambes. Il les veut à même de lui donner de bonnes raisons de les battre. L’homme n’est que dégoût profond pour ces horreurs de l’enfer, ces erreurs de la nature ; ne saurait penser qu’à sa femme enceinte quand il les regarde, au malin plaisir qu’elles se feraient de lui sectionner le ventre pour dévorer le fœtus à même la chaleur béante de ses entrailles.

Alors Ernest tient son rôle à cœur, au rythme des coups de bâtons et du grésillement des néons, dont le doux bruit lui rappelle l’électricité extatique des exécutions. Dans ces limbes en geôles  entre le monde des vivants et celui des enfers, l’homme prodigue ses sentences divines dans un malin plaisir autant qu’une foi militante. Dieu rappellera ses brebis à ses côtés et lavera la Terre des impies pour les envoyer droit au Purgatoire ; lui n’est que l’humble main officiante de Ses absolus commandements.

Et puis, il y a le numéro vingt-deux. Aberration fascinante qu’est cette force de la nature, réduite en tas d’os et de chair liés entre eux par des ligaments tirés jusqu’à la corde, sous ses bons traitements. Cloué à son mur d’argent comme le christ sur la croix, foutu martyr sans la moindre résistance. Fracassé trop vite, il pend comme un sac au bout d’une corde, l’œil vide et le museau bas, sec ; dans l’espoir sans doute, d’arracher quelque compassion à son tourmenteur. Ernest n’est pas dupe, c’est un monstre parmi les autres, seulement émasculé : un instinct sans conscience qui le mordrait bien volontiers, si on ne lui avait pas limé les crocs. Sans la moindre repentance, c’est le comportement d’un rat de laboratoire plus malin que les autres dont le gardien est témoin tous les jours, celui d’un bestiau qui aura compris que la réaction induit la douleur.  Pavlov est le seul maître des chiens et cette passivité face à son sort le révulse plus encore peut-être, que la rage inutile et réjouissante de tous les autres. « Tu es déprimant. » lui éructe Ernest tous les jours, ne recevant pour réponse qu’un œil hagard, sans plus aucun élan vital. Alors il prolonge le calvaire, repousse l’exécution qui serait son ultime soulagement. Le garde jalousement, ce gros tas de muscles et de monstruosité, comme un paysan plante un éventail dans son champs pour éloigner les charognards. Que sa croix serve d’exemple aux autres, que les insoumis contemplent ce à quoi on peut être réduit quand on veut déroger aux règles, à la fatalité de son horrible existence. Ni un homme ni un monstre, rien plus qu’un tas d’os et de chair liés grossièrement ensemble.  Régulièrement soulevé d’une respiration sifflante, obsolète, à prier pour qu’elle daigne enfin s’arrêter, nous accorder le repos éternel.  Mais ce ne serait qu’abandonner un enfer pour l’autre qui t’attend, nous le savons tous les deux.

Aujourd’hui, Ernest écume de rage. Rares sont les regrets dans son existence de droiture, peu de remords en sa vie exempte des bas instincts de l’humanité elle-même. Ses yeux sans couleur, tombants et mornes portés sur un mur vide, trace de sang sur le suaire. Libérée, la bête immonde ; combien de temps avant que ses couilles ne lui repoussent,  que ses crocs retrouvent leur forme d’antan. Combien de jours, d’heures ou de minutes, avant que la créature infâme ne répande à nouveau ses obscènes offices, ses ignobles desseins.
Tout ça par la faute d’une autorité fantaisiste et inconsciente, un pantin trop riche qui voulait tromper l’ennui en se payant un animal exotique.
Il regrette, Ernest, de ne pas l’avoir fait passer plutôt sur la chaise, d’avoir cédé à la gourmandise de ce spectacle, qui est un pêché et dont il se repent.
Il aurait dû le crever.
Car ce n’est pas un Homme.
C’est un chien enragé, une créature lubrique, condamnée à n’être qu’un tueur.


Look around, we’re living with the lost and found
Just when you feel you’ve almost drowned, you find yourself on solid ground
And you believe there’s good in everybody’s heart
Keep it safe and sound
With hope, you can do your part to turn a life around


L’adrénaline est le poison dans mes veines qui fait battre mon cœur.
Les yeux baissés sur son arme, Eloise refoule une grimace anxieuse à constater le tremblement qui l'anime - infime, imperceptible, qu'elle perçoit pourtant. A ses côtés, au milieu de la troupe, un instructeur l'interroge d'un regard, qu'elle apaise en un signe de menton bref, assuré.
Assurée, elle ne l'est pourtant pas tellement. A l'aube de sa première intervention dangereuse, elle repense à sa formation, remet en question jusqu'à son utilité. Son gilet pare-balles lui scie les épaules comme une amure de fer; son arme lui semble désormais bien dérisoire. Et ce coeur qui bat la chamade, d'une excitation teintée de stress, l'énergie folle et l'angoisse en lutte perpétuelle dans ses membres, l'affligeant d'un tremblement constant. Mâchoire scellées à s'en fendre les joues, Eloise inspire un air serré dans ses poumons grands ouverts. S'apaise dans la certitude de sa basse besogne, simple sécurisation de périmètre pour laquelle elle ne devrait pas tellement s'en faire.

Elle se détache si tôt mise en route, d'ailleurs. Avec un collègue plus chevronné, prend la face ouest de la petite maison pour la longer d'un pas efficace, furtif, l'oeil aux aguets. Dans une communication muette, obtempère aux ordres de son supérieur de le suivre jusqu'à un cabanon, jeter un oeil à l'intérieur. Une fenêtre obstruée de poussière lui jette de minces filets de rance; mélange décapant de merde de rongeur et de produits en tous genres; qui lui explose au nez quand, couverte par son instructeur, elle en ouvre la porte d'un coup de botte.

La silhouette assise devant elle, le regard vide, la choque à l'en faire sursauter. Oublier, l'espace d'un millième de seconde, ces choses auxquelles on l'a mille fois entraînée. Mains en l'air. Arme dressée, autorité bafouée par les notes aigues de panique dans sa petite voix inexpérimentée. Surprise à nouveau, quand l'homme obtempère en gestes spectraux, puis se vautre sous son ordre dans la merde et la poussière. Incertaine de ce qui vient seulement de lui arriver, la vitesse comme la facilité, Eloise regarde son supérieur passer les menottes sous sa garde en joug, l'entend rappeler les troupes, suspect retrouvé. Une main presse son épaule au passage, avec fierté, à laquelle elle répond d'un sourire pâle, déphasé.

Son oeil s'accroche, malgré elle, sur l'homme qu'on traîne dans la voiture sans une once de résistance. Sur son visage livide et son oeil hagard, ses épaules basses comme si on venait d'y jeter toute la tristesse du monde. Repense aux mots du débriefing, aux instructions défilant sur cette silhouette maladive, sans qu'aucune ne s'y colle vraiment. Suspect impulsif, dangereux, meurtre présumé de sa femme à l'arme à feu, refus d'obtempérer probable, prenez vos gilets pare-balles.

Elle le voit monter dans la voiture, cet homme dangereux et son oeil hagard. Contemple sa contemplation. Un gouffre au fond des yeux, à travers la vitre sale.

Eloise croyait débarrasser la ville de l’un de ses monstres.
Elle n’a fait qu'arrêter un Homme.


I cannot believe my eyes. Is the world finally growing wise ?
‘Cause it seems to me, some kind of harmony
Is on the rise.


Oui, je veux me repentir. Je veux me confesser. Je veux laver mon visage à l'eau bénite et voir si elle le brûle, si elle le déforme, si je suis un monstre bon pour les enfers ou si le Saint Père daigne encore m'accepter en son sein. Je veux qu'il y ait ce dieu auquel j'ai jamais cru et qu'on m'a jamais vraiment incitée à croire; qui récompense le juste et punit le mécréant.
Je veux qu'on me punisse, je veux qu'on m'apaise. Je veux un semblant de justice, même si elle cause ma perte. Pour qu'il cesse de n'y avoir rien. Rien que le chaos et le vide, rien que la vacuité et les choix insondable dans le néant de l'existence.
Je veux qu'on me crucifie, je veux qu'on me flingue.
Je veux qu'on me bénisse et qu'on mette un terme à mes défaillances. Pour ne plus jamais avoir à vivre avec. Pour en être pardonnée, enfin. Pour me pardonner, putain.


Elle le toise, le Blondin, dans un silence mortuaire, dans les secondes de répit et de distance dont il a bien voulu la gratifier. S'adonne à la mascarade confondante de ses jeux morbides, pour un tout petit moment; rentre dans la danse du vautour qui tourne autour de sa carcasse, dans le vain espoir de le comprendre. Saisir de quoi vit le charognard, ce qu'il bouffe, de quelle horreur il se repaît - l'argent ou les femmes, la drogue ou la souffrance. Savoir  quel genre de rituel il exécute avant son crime, et de quelle abomination il va la gratifier. Un meurtre ou un viol, est-ce que tu poignardes ou bien tu étrangles ? Elle le sonde, à voir ces questions qu'elle n'a pas la force de saisir, qui semblent le ronger pourtant de tout son être. Cet appel grossier à des réponses satisfaisantes, juste pour un petit moment; cet instant de grâce que tout le monde cherche, l'illusion fugace et belle qu'on a contré la vacuité de l'existence. Elle a envie de pleurer; pour lui, pour elle, sur lui, loin de lui. Envie de capter l'appel de la bête, juste pour avoir le loisir de lui foutre dans la gueule, et la truffe dans sa merde. Saisir les nuances des émotions presque absentes qui lui traversent le visage, pour mieux les écorcher en même temps que sa formidable gueule de parfait connard.

" A quoi tu t'attendais, Blondin ? déclame t'elle alors, dans un murmure presque inaudible, à ce jeu dégueulasse et cette danse obscène. A une histoire de monstres pour effrayer les gosses ? Bête contre bête, l'horrible transformation sous une lune sanglante, dans une foutue berline ? Saint Georges et le dragon, c'est avec ça que tu voulais divertir ta putain d'existence inutile ? elle sourit, Eloise - n'a plus tellement la force ni l'envie de rire, pas même noir, ni vraiment jaune. Juste une grimace tortueuse lui déformant la porcelaine lisse de son doux visage. D'un geste sans équivoque, elle lève le bras devant elle, le gant noirci de sang et délavé par l'alcool, la main fautive barbouillée des preuves de son funeste crime. Rien que des poings très humains, sur un visage très humain. Désolée de te décevoir; mais je t'avais prévenu que c'était pas intéressant. "

Rien qu'une fille, qui aura quitté la ville demain.


" Des menaces, oui. Peut-être que j'aurais pas dû m'en tenir à ça. Six mois de menaces et on finit par oublier ce qui peut arriver. Je devrais commencer à songer à passer à l'acte.
- Tu parles! T'en feras rien. Parce que c'est ça qui te fait bander. Le pouvoir que t'as sur elle, sur moi. Parce que si jamais tu me condamnes t'as plus aucune emprise sur ce que je pourrais te faire. T'es un lâche, et un misogyne, et je sais pas ce que ta mère t'a fait mais t'as un foutu problème! "


Anyone with half a brain could spend their whole life howling in pain
‘Cause the dark is everywhere and no one seems to care
That soon the dark in me is all that will remain
Listen close to everybody's heart and hear that breaking sound


Dans le claquement sec d’un bois de mauvaise facture contre un autre, Ronda reprend son souffle au milieu du cloaque qui lui fait office d’entrée. Elle se débat au milieu de son manteau et des autres suspendus pour se dévêtir, dodeline sa carcasse malmenée jusque dans sa cuisine ; gratifiant au passage, le vieux labrador bonhomme venu l’accueillir, d’un grognement lapidaire. Tirant une chaise jusqu’au mur, elle s’échoue dessus, Ronda – dans une puissance qui la flingue, un bruit qui la morcèle. Et que de morceaux ça ferait. Dans sa solitude accablante, sous l’œil indulgent de petits chats de faïence, Ronda s’arrache un rire, tordu aussitôt en un sanglot coupable, la main machinalement serrée autour de la graisse de son vieux labrador. Sans rancune, la bête laisse aller son museau sur ses cuisses grosses à recouvrir toutes les blessures, sa gueule canine un peu avalée entre les plis que forment le trop plein sur son encolure. Un glapissement le secoue, calmée par une flatterie difficile. Refoulant les larmes dans un spasme de rage, Ronda masse ses vieux genoux écorchés, aux articulations éclatées par le surpoids, à ne plus réussir à la tenir en l’air. Si elle se moque des éraflures, de ses bas filés comme de la boue sur ses horribles robes, la brèche ouverte de son ego est beaucoup plus douloureuse, rouverte comme presque tous les jours pour saigner continuellement en elle-même. D’un petit tiroir rayé, Ronda arrache un paquet de gâteaux secs qu’elle éventre déjà, avalés par paquet de trois. Pour faire une barrière aux larmes, un tapis de douceur sur les blessures, un voile protecteur à ses chairs meurtries depuis toujours.

Elle s’en fiche d’être grosse, Ronda – le répète à qui veut bien l’entendre, et ses copains qui la taquinent et ses amis qui s’inquiètent pour elle. Seulement il y a des jours comme celui-là, des jours où l’Homme chute et le bateau coule, sans assez de force pour redresser son énorme carcasse au-dessus des flots. Des jours où dans l’exhibition malencontreuse de ses chairs volumineuses et flasques sous ses couches de vêtements informes, elle déteste être grosse. Des jours où si ce ne sont les moqueries constantes, il y a quand-même le regard d’un homme pour la voir. Un homme en âge et condition de désirer une femme, qui ne la désirera jamais, elle. Parce qu’elle est obèse. Parce qu’il y a cet énorme tas de peau qu’elle a bâti comme une écharpe sur son cœur, qu’elle voudrait pouvoir quitter, comme on enlève son costume en rentrant chez soi le soir. Cette horreur de graisse sous laquelle doit se dissimuler une belle femme, une femme morte que personne ne pourra plus jamais voir. Elle mourra moche et grosse, d’avoir bouffé sa solitude pour ne pas être bouffée par elle. Alors dans un sanglot rentré, Ronda déchire le paquet de chocolat. Elle l’avale sans y prendre le moindre plaisir, rongée par une culpabilité monstrueuse que la bouchée suivante épanche l’espace de maigres secondes. D’un cercle infiniment répété, Ronda baisse ses bras énormes qui n’ont plus la force de se soulever en l’air. Elle mange, pour effacer le regard de cet homme et celui de tous les autres. Assis sur sa chaise, dans sa vie qui doit être belle – déjà parce qu’il est mince, seulement parce qu’il est beau. Elle tue ses larmes et sa détresse du poing rageur qui ramène les aliments dans sa gorge, dans un dernier élan vital, un instinct vicié à ne jamais le laisser l’abattre.


C’est un connard, un bellâtre à la vie facile – qui se fout bien du poids de son existence.


Take it slow, they look at me and seem to know
The things that I’m afraid to show And suddenly I feel this glow
And I believe
There’s good in everybody’s heart, keep it safe and sound


Eloise est belle pour son douzième anniversaire – belle comme une reine trop jeune dans sa cour d’homoncules. Au milieu du jardin immense de son domaine intimidant, elle palabre comme les grands dans un groupe de sujets, le verbe trop riche et l’attitude pleine d’assurance. Une jupe en dix ans relève les couleurs d’un justaucorps pour enfant, uniforme de gymnastique avec lequel elle gagnait sa médaille deux heures auparavant, trophée portée à son cou comme une écharpe devant son cœur. Le corps refusant de se sexualiser déambule, gracieux dans son éternelle jeunesse, mutin de son enfance persistante. De ses sourires espiègles et ses tâches de rousseurs mal organisées à son âge, elle gratifie le monde de levés de jus d’orange comme on trinque aux plus grands crus, sous l’œil ému de ses parents. Un gâteau de pâtissier distribué entre les convives, que composent toute sa classe et une grande partie de son collège ; des adultes dont elle ne se souvient pas venus admirer des trophées dont ils n’ont cure. Elle évolue dans une grâce que le monde lui envie, un pas propre aux habitués des sauts et des vols aussi instinctivement qu’à la marche. Des amies qui ne dureront pas s’éventent en compliment sur son allure, des garçons encore jeunes prennent une minute dans leur sport et leurs défouloirs pour s’intimider de sa présence. Elle ouvre des cadeaux inutilement chers sous l’œil jaloux d’amis qui ne sauraient pas plus qu’en faire, se vante d’offrir des activités uniques et payées par ses parents à ses jeunes hôtes exaltés. Dans la chaleur d’un mois de juin que tabasse l’été romain auquel ne s’habituera jamais sa peau laiteuse, l’enfant ne brille plus seulement par sa chevelure.


On prend la peine de la féliciter maintes fois sur son gâteau, douces convenances remerciée avec politesse, sans grand mérite pourtant à ses délices. Sa propre part abandonnée au profit de quelques discussions enflammées entre filles de son âge, elle s’emploie à la récupérer sur un coin de table, et fait le tour du domaine avec, jusqu’à se trouver enfin seule avec son gigantesque labrador. La pâtisserie de luxe est lapée par l’animal réjoui ; encore tout heureux de trottiner à sa suite une fois le met englouti, des fois qu’un  nouveau délice ne s’égare jusqu’à sa langue. Assis sur le porche, l’animal lève une oreille curieuse sur cette petite maîtresse disparue comme une ombre dans les toilettes.

Un bruit inquiétant le ramène jusque devant la porte close, un autre le fait glapir une ou deux fois. Cette production de spasmes et de gerbe, signe d’empoisonnement dans le monde animal, à faire chuter la queue frétillante d’une angoisse furieuse pour la sécurité de l’enfant. Habituée, la petite lui flatte la tête quand elle ressort, pour faire taire les réactions idiotes et trop peu discrètes de cette brave bête. Les dents brièvement brossées, elle trottine sans se formaliser de ses vertiges jusqu’au couple parental pour les remercier encore, de la fête et du festin, des jeux et de ce fabuleux gâteau, rien que pour son anniversaire.
Elle reprend corps, dans la brûlure cuisante de son estomac vide, la bouffée des malaises qui la menacent. Comme des barrières de métal à l’intérieur de son corps, une armure de contrôle à son âme meurtrie depuis toujours.
Soulagée d’un poids.


" Et qu'est-ce que tu vas faire, hein ? Tu vas monter une association de protestation avec la pute qui te sert de copine ? Vous allez faire des banderoles, vendre des gâteaux, tu...
- La ferme la ferme LA FERME. "


Hopes and dreams are shattering apart and crashing to the ground
With hope, you can do your part, to turn a life around.


Mais tu attends des réponses. Le prix de la paix que tu m'as arrachée pour t'en faire une écharpe; et moi un chantage.

Accablée, mademoiselle baisse la truffe une seconde; la culpabilité reprend ses droits sur la révolte, la réalisation sur le déni. Les épaules basses, elle inspire un air court, douloureux dans sa poitrine, qui paraît déjà lui apporter plus de perte que de bénéfice. Les relève dans une accalmie passagère et relative, vers l'homme qui la toise et l'accule toujours. Une curiosité morbide pour les gestes aberrants de ce type, ce grand blond qui n'était qu'un anonyme dans la foule des criminels; dans un bref instant d'égarement. Pourquoi tu fais ça ? Sa pupille l'implore, plantée au milieu de son visage détruit, dans le grain de ces menues secondes; moins de la laisser partir, que de le lui faire comprendre. Tu te souviendras de moi ? Le visage d'une femme qui n'a plus les épaules d'être forte, qui voudrait admettre sa fragilité sur d'autres, juste une seule fois, juste pour une parenthèse. Le coeur qui battait à tout rompre n'est plus qu'une masse spongieuse peinant à se contracter de temps à autre pour se vider de son propre sang. Elle a mal, Eloise - tellement mal, mal à bas bruit, mal à ne plus savoir comment identifier la douleur. Si je te le disais, est-ce que tu aurais la bonté de me tuer toi-même ? Là, sur le porche d'une église, sous l'oeil sacré du Saint-Père... est-ce que tu porterais le poids de ton acte, ou bien tu l'égrainerais seulement dans d'autres oreilles; tu t'en laverais les mains comme on vend de la drogue pour ensuite laisser les camés mourir.

Dis-moi, Blondin. C'est quoi le courage ?
Est-ce qu'il t'en reste ?
Cette force dégueulasse et humaine, la grâce uniquement de commettre l'horreur soi-même, d'en porter le fardeau ensuite, l'insomnie des linceuls laissés sur son passage.
Est-ce que tu dors, la nuit ? Est-ce que tu t'aimes, la nuit ?
Est-ce que tu t'en laves les mains, ou est-ce que tu ne te supportes plus, à briser tous les miroirs ?

Se confesser, oui. Elle voudrait. Hésite, autant qu'elle se flingue et s'explose sur l'éventualité pure et simple du suicide. Cracher l'inavouable, admettre l'infamie. Gerber ces secrets qui la rongent, qu'elle porte depuis deux ans. Juste pour voir; juste pour savoir. Ce qu'il en ferait, ce criminel. S'il reste une âme dans les galeries crasseuses de la pègre, pour entendre ses aveux et ne rien en faire. Dans le silence d'église entre leurs corps, l'absorption confondante d'un corps au bord de la rupture, elle s'adonne à son propre jeu, Eloise. A ce qu'elle dirait, si elle le disait.

Que c'était son frère, plus que ça encore. C'était l'entité salvatrice qu'elle appelait dans ses nuits de terreur, quand elle était incapable de discerner le Beau dans un monde d'horreurs. L'homme dont elle connaît la femme, dont elle a fêté l'anniversaire, et celui de son mariage, et de ses deux enfants en bas âge. Celui à qui elle a remis sa vie plus de fois qu'on s'en remet à l'amour de sa vie. Cet homme, béni de la confiance aveugle d'une fille qui avait perdu le savoir de faire confiance. Une amitié au-delà de la morale, au point d'avoir remis en question son crime et toutes ses preuves, d'avoir pu mettre en doute la parole d'une fille dont elle avait assisté à l'horreur, de ses propres yeux qui en ont déjà trop vu. Cet homme, qui n'était ni son amant ni sa famille, était le pilier de son monde en ruines. Une partie des fondations, sur lesquelles elle voulait construire un foyer pour ses propres enfants.

Le divin salut de la confession.
Arraché.
Comme le reste.

" C'est un flic. qu'elle crache, d'une voix morte. Ajoute, placide et lapidaire, plus éteinte à mesure que l'autre lui arrache les tripes de révélations mensongères. Il m'a violée. Un battement de cils absent fait naître un sourire. Puis, anarchiques, d'autres larmes au bord de ses prunelles. Un sanglot dans sa voix quand elle darde l'autre d'une interrogation vaine au fond de ses prunelles, de compulsifs hoquets venant secouer la contenance défaillante de ses sarcasmes.
Tu crois qu'il va s'empresser de se plaindre à ses collègues qu'une indic dont il abusait l'a tabassé ? Ou peut-être qu'il va riposter, tiens. Il va me cogner avec ses petits poings pour faire entendre sa virilité bafouée.

Un poing rageur efface ces nouvelles larmes, sitôt supplantée par d'autres.
Dans une révolte soudaine et insoutenable, Eloise pousse et percute à nouveau le corps devant elle, dans la secousse d'un sanglot. Elle le cogne avec violence, pour le faire reculer loin d'elle, pour expulser un embryon difforme du monstre de rage et de haine qui lui déchire le ventre. Qu'il s'écarte. Qu'il dégage. De l'air, par pitié.
Ses jambes flanchent plus qu'elles ne plient, le dos allé jusqu'au sol contre la porte dans un frottement vulgaire. Echouée sur le perron, Eloise arrache ses mains frêles et blanches à ses gants en gestes frénétiques: tremble à la recherche d'un paquet de cigarettes. Massacre le carton dans une secousse incontrôlable quand elle en prélève une. Va jusqu'à peiner à dresser la flamme de son briquet devant sa fumante, dans sa détresse fébrile, sa douleur destituée de barrière, qui tremble à menacer de s'effriter au sol.

" Si tu le répètes, tu me tues. elle largue, la voix enrouée de larmes, anone mot pour mot ceux de la véritable victime, dans une phrase qui semble presque l'apaiser elle-même. Une accalmie étrange dans les hoquets que sont devenus ses mots, signe d'alarme flagrante à son réconfort. T'auras peut-être même pas le temps de le faire, Blondin. J'ai cette fâcheuse tendance à vouloir contrarier les connards. Inspire une goulée brutale et meurtrière de la fumée âcre, enfume les sanglots de l'intérieur, pour une trêve dérisoire et temporaire à leurs assauts. Maintenant j'ai versé mon payement, je t'ai raconté. Alors tu prends tes responsabilités. Tu te barres ou tu t'assieds. Tu vas me dénoncer ou tu restes et tu attends demain pour le faire. Mais par pitié... tais-toi. "


I cannot believe my eyes
How the world’s filled with filth and lies
Is the world finally growing wise
But it’s plain to see
And it's plain to see
Evil inside of me
Rapture inside of me
Is on the rise

-

Julien Clerc - Utile
*Paroles : My eyes - Dr Horrible sing along blog
Adele Croce
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Les charognards [Sigurd] - Sam 10 Fév - 17:27
Sigurd Strøm
lycans
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Sigurd Strøm
EFFIGIE : charlie hunnam
BAFOUILLES : 77
PACTE : 19/01/2018
Les charognards [Sigurd] Tumblr_n5cf1sHMyD1qmdxjuo5_400

OSSATURE : 35 années grossièrement gerber sur le faciès, des décennies d'errance difficilement planquées par la pupille abyssale.
CONTRAT : Célibataire
BESOGNE : Toutou du professeur tu as été, toutou du professeur tu resteras... Limier pour l'Opus. Récemment nommé nounou de Jessy
FABLE : Connaissance accrue du surnaturel et des diverses espèces qui le peuplent, le tout, soigneusement enseigné par le Professeur fou des temps modernes.
ÉCHINE : Maudit et assujetti au clairon de la lune.
PRESTIGE : Force décuplé, haute capacité d'analyse, instinct meurtrier poussé à l'extrême, don offert sous le coup des entraînements d'une existence bercée dans le noyau de la pègre et de la violence .
GANG : Allégeance faite, il y'a de là des années, au Professeur.
CREDIT : Avatar / sign"@Adele Croce"
LES CHAROGNARDS

Adèle & Sigurd


All alone
Open-eyed
Burn the page
My little dark age

Peu importe le problème, peu importe c'qui règne dans l'atmosphère. Je suis pas un héro, j'serai jamais la solution. J'suis l'cailloux planté dans la codasse du monde.

Elle toise. L'iris azuréenne accuse, aucun crépuscule pour l'adoucir. Ca le foudroie, ça le perce. Ca lui rejette, un instant, comme déclaré à la face du monde, de par son mépris, de par sa hargne. Elle lui balance, le reflet de la bête. Celui du monstre. Du vautour, qui pue la mort, qui pue la chaire. L'accalmie se fait sournoise ; comme l'air glacé par un ciel dégagé. Il se prend, de cette façon presque machinale, à dodeliner, d'un pied à l'autre, de bouger, maladroitement la carrure qui l'empêche de se mouver, sans qu'on le remarque. Comme gêné, par une étiquette coincé contre son flanc. Il grimace. Se rappelle, la bête affable, que tout le monde semble reconnaître. Malgré sa capuche. Malgré son silence. Malgré ses épaules, recouverte de ce cuir usé, rasé aux murs. Les épaules de l'homme heurté par l'égo, celui jugé, apostrophé singulièrement, rarement gratuitement, de monstre. Il se gratte l'arrière du crâne, balance sa capuche en arrière pour découvrir sa caboche hirsute. Toujours, en des gestes machinales. Sans nervosité, juste parce qu'il sait que bouger, c'est normal. Comme respirer, comme parler. Cette langue qui l'oblige à froncer les sourcils, systématiquement, pour trouver les mots, les prononcer sans avoir l'air con. Il tente, parfois, toujours vain, de se redonner consistance humaine, comme recouvrer sa propre humanité. Vire tout accoutrement pour observer un reflet qui ne dément de la férocité qui hante les traits. Tirés, fatigués. Oubliés. Il a ce visage creusé. Dévasté. De celui qui a vu. De celui qui a trop vécu. Le faciès juvénile s'est troqué, au mérite d’une froide antipathie, pour s'orner de toutes ces cicatrices. Les guerriers les exhibes comme trophées, lui, comme une vulgaire marque du passé. Un passé d'il y a longtemps, un passé d'hier. Un futur passé de demain. Parce que ça s’enchaîne. Comme lui rappelle les cicatrices des liens contre sa gorge, ses poignets, jusqu'à ses pieds. Ca s'enlace à la puérile existence, cette matière froide. Et ça le rend malade, de la voir, elle, s’apitoyer de sa hargne de ce que lui, subit depuis des décennies.


You know that if it hides
It doesn't go away
If I get out of bed
You'll see me standing all alone
Horrified


Les yeux qui débordent, les larmes séchées, sillonnent ses joues. Trop rondes, trop douces. Trop enfantine pour appartenir à ce monde, son monde.  Légèrement rougies par l'effusion, vaguement moins blême, il se demande, un instant, à quand remonte le jour -à moins que ça soit la nuit- où ses joues ont rougies, à lui aussi. Le regard glisse, se penche sur les crispations musculaire. Il devine, sous le cuir tendu, la tension qui bat la mesure contre ses paumes. Observe se tendre la chaire pâle, préservée, du dessin, souillé par l'odieux pinceau du massacre, qu'elle lui offre. Ce sang qui, comme un grumeau dans un liquide charmant, brouille les traits incertains. Tantôt prête à se disloquer, la voila à même de se jeter sur lui. Pas d'une tour désolée. Pas d'un immeuble isolé. Sur lui. Et sa gorge, dont la carotide frappe tendrement, langoureusement, comme l'instant, sur sa peau. Dévoile un instinct meurtrier que Sigurd, n'a encore jamais soupçonné. Chez elle, dont le rire sépulcrale offense, aboie. Adele, dont le nom lui échappait encore, il y a quelques instants. Patronyme balancé brièvement, dans un devoir de reconnaissance futile. Il aurait pu ne jamais s'en rappeler. Non pas par mépris. Par lassitude, qui lentement, s'est creusé dans l'esprit léthargique. Vidé, comme cette abysse infernale qui fragmente ses pensées. Elle renifle le danger dans chacune des micros particules qui semblent l'enrober. Il mesure. Démesure, découd, rassemble, compare, déchiffre. Ca le fascine, dans le fond. Cette overdose de sentiments. Cette frénésie émotionnelle. Cette empressement, cette urgence...Ce besoin de gueuler sans retenu, contrôlé par la barrière des quenottes serrées. C'truc que j'vois plus nul part d'puis un paquet de temps.Il penche la tête sur le côté, sans l'onde d'une expression peinte sur le visage. Ca lui plait. Bizarrement. L'incompréhension. Le déni. Comme une croûte qu'on a la satisfaction d'arracher, laissant couler la plaie. Il gratte, du bout de l'ongle, la couche de cire noir qui l'enrobe. La regarde, amèrement, couler. Comme ses mots qu'elle balance, dans le but de le faire dégager. Mais elle le retient. Elle le maintient, n'arrive à l'arracher à son air hébété. Le goût du désir est là. Celui de voir, celui de croire. Parce que ouai...j'veux y croire, j'veux croire qu'on est pas tous né monstre, pour être monstre, qu'il y'a encore de l'humanité en toi.. que t'es pas aussi pourrie qu'ma moelle, à moi.

A quoi tu t'attendais, Blondin ? hein ? C'est vrai ça...j'm'attends à quoi venant de toi ? A rien, j'm'attends à rien et c'est ça, qui est louche, qui m'bloque... c'est qu'y'a rien qui m'attend. Ses yeux injectés hurlent à l'aide, hurlent une douleur vieillotte, un truc passé. Ca sent le rance. Ca date pas d'hier, ni de ce soir. C'est le venin libéré après avoir longuement mijoté. Comme un bon vin, sauf que là, c'est purpurin, mais dégueulasse. Il a envie de le saisir, ce poing qu'elle brandit, comme preuve, comme mensonge à ses paroles. Il a envie de le tordre, de l'enserrer entre ses phalanges. De la secouer pour la faire cracher, comme une machine à monnaie mal menée, les pièces manquantes qu'elle lui omet. Sciemment. Insolemment. Alors que ses yeux fouillent en elle ouvertement, elle se démène contre elle même. Mène une lutte dont ils ne saisissent la raison, mais observe le combat fébrile. Y'a toujours ce jeu de regard qui l'oppose, de sa partie, de son coin qui fait obstruction à toute fuite, éclaire à peine, la mince silhouette affaissée contre la pierre romaine. Elle pourrait sembler fragile, presque docile, si elle n'avait cette hargne qui scintille au coin de la pupille. Et puis cette voix, qui résonne, n'a rien de cristalline, mais qui se brise. Brise. Comme prête à lui donner l'estocade. Non pas par un coup de gueule bavante; mais par sa considération absente.

"-T'empestes la mort, t'empestes le remord... t'crois que je connais pas ce parfum ? " C'est le mien...


Seeing what's to come
The image of the dead
Dead ends in my mind


Non, je dors pas la nuit.
Non, je vis plus la nuit.
J'accomplis, j'abrège, je salis.
C'est mon job. Et toi ? C'est quoi le tien ? Tu penses que ton existence est plus merdique que les autres ?
Tu penses qu'on devient monstre ? Sans obscénité, sans maltraitance ? Qu'on devient juste charognard, par plaisir de rogner la chaire sale ?

Le silence retombe, déploie le vide, incapable Il connait que ça, le vide. Il côtoie le parler peu courant de la mort, il murmure d'un souffle acharné, l'heure du sommeil, sans aucun réveil. Mais là, ça sonne creux. Le silence des souffles qui s'entremêlent sans se toucher. Juste unis. Par un bref effleurement. Sans échange. Oeil contre oeil. Il se sent, à son tour, jaugé. Y'a plus de colère. Juste l'air résigné qui s'infiltre, comme un nuage vaporeux, entre eux. Une inspiration résignée, démunie. Dans un instinct de désolation unique. Au point qu'il aimerait sauvegarder le moment, l'imprimer sur une feuille papier, pour se l'accrocher sur la gueule. Histoire de se rappeler, ne jamais oublier. Jusqu'à ce que les lippes daignent, enfin, frapper l'air. Éructer froidement, la vérité morbide. Il assiste, à la naissance du monstre, germant du sang, d'un autre monstre. Le viol... Ca, il comprend. Quelque part, dans les tréfonds de la conscience. Une époque avortée. Le déchirement de la chaire, déshumanisée. Imperceptiblement, un énième pas les sépare. Comme une fuite machinale du corps. Alors que l'esprit est resté bloqué sur les paroles. Le sarcasme comme seul rempart, la face se dégringole. Un mot résonne, ressort.

"-Indic... Bordel..."

Qu'il souffle. Comme si un poing venait de lui écraser l'estomac. Sans avoir le temps d'enclencher un deuxième pas en arrière, elle se redresse. Brusquement. Sans attente. Le bouscule, encore. Le heurte. Comme pour le faire chuter, comme pour le voir, à son tour s'étaler. Il se retient, fermement, une nouvelle fois, de la saisir. Par les épaules, pour la cogner, sagement, contre la pierre. La calmer, le temps que ses pensées retrouvent un ordre cohérent. Mais il y'a ces images. Ces entrevues. Ces minutes engrenées à peser, à attendre, à échanger. Le temps d'un bref instant, il se demande s'il est fiché, quelque part, sur un dossier. Elle est trop droite. Trop fragile, dans un sens du devoir qui lui échappe. Tu pouvais pas être du milieu...putain. Il aurait pu la tuer. Là. Sans utilité, juste dans le doute qu'elle ai pu démanteler leurs liens, le faire remonter. C'est à son tour de se tendre. Inspirer, profondément, avant d'éjecter le trop plein. S'asseoir. La tuer. Peu importe, à l'heure qu'il est. Il réfléchi désordonné, abrupte. Il défonce, d'un coup de pied brutal, légèrement trop hargneux, le bois qui barre, de l'autre côté, les doubles portes de l'église. Elles semblent éclore. Ouvre les lieux sacrés, à leur tour violé. Il s'en fout. Ils prieraient bien pour eux, même sans avoir de dieu, s'il le pouvait. A travers les craquements de parquet, il sent, l'air chaud et parfumé d'un lieu nargué par ses souvenirs. Il détourne ses yeux mornes sur elle, semblant hagarde, comme après un shoot de morphine.

"-J'te tuerai pas ce soir."

Conclusion qu'il apprend en même temps qu'elle. Décision prise, dans le vent. D'un signe de tête, lui indique de le suivre. De pénétrer ses lieux dénués de sens, à présent. Sans aucun respect, ni autre forme de procès.

"-T'aimes dieu ? Moi, il me laisse perplexe. J'pense qu'avec tout l'mal qu'on se donne pour lui, il aurait pu s'prendre la peine d'exister..."

Il partage, sans vraiment partager. Lui cause, sans vraiment lui parler. Il se met à penser tout haut, certainement. Balaye des yeux le théâtre grotesque, presque ironique, qui lui fait face. Les mains profondément enfoncées dans les poches de son jean, il se tord la langue pour se retenir de réclamer une bouffée de nicotine. Se contenter d'inspirer l'odeur goudronné qui le fait doucement saliver. Se souvient, vaguement, un autre temps. Celui de l'insouciance volée. Attroupé, parmi les moutons, au sein des bergers, plié à prier, sans pleurer. Courbé aux croyances qui l'avaient sitôt abandonné.

"-J'ai déjà bu de l'eau bénite ...Gamin...chez moi, la religion c'était tout un bordel... puis j'avais soif, j'ai juste trempé mes doigts pour les foutres dans la bouche, voir, si je me sentirais mieux après... j'ai rien senti. Juste de l'eau qui goûte l'eau."

Et dieu, c'est pareil.


Come find us heading for the bridge
Bring a stone
All the rage
My little dark age



MR. CHAOTIK


Sigurd Strøm
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Les charognards [Sigurd] - Jeu 22 Fév - 14:15
Adele Croce
lycans
lycans


Adele Croce
EFFIGIE : Saoirse Ronan
BAFOUILLES : 1246
PACTE : 30/11/2017
OSSATURE : 28 ans
CONTRAT : Célibataire, mariée à son métier, indisponibilité temporaire pour descente dans le tunnel de la drogue. C'est Alice au pays des merveilles avec des flingues.
BESOGNE : Dealer/Rabatteur (Agent du GOA infiltré)
FABLE : Adele sait tout ce qu'il y a à savoir des meutes et comment les éviter. Elle a de faibles notions sur l'existence des sorciers. Renifle et fuit les suceurs de sang avec efficacité. Des sirènes ? Faut quand même pas exagérer.
ÉCHINE : Wolfman (la version originale, bien entendu. Rien ne vaut les classiques)
PRESTIGE : Faiblarde pour les alphas, Hulk pour les humains. L'odorat d'une femme enceinte et la médaille d'or au quatre cents mètres haie. Au bas de l'alphabet grec et de la chaîne alimentaire, Adele n'est pas plus épaisse qu'un gros chien (bon d'accord, un très gros chien) Poule pondeuse pour sa race, c'est sympa les omegas. T'as raté quelques pages de l'histoire du féminisme, Dame Nature.
GANG : Nostro Regno. Tant qu'on gagne, on joue.
CREDIT : ava by me / sign by lazare
.Les Charognards.


Grand bien t'en fasse; si ça peut soulager ta petite existence. A défaut du confort des bonnes actions, juste dans le soulagement de l'indifférence. L'effort épargné dans l'absence de réponse. Parce que ça t'en demanderait, Blondin, des efforts pour me tuer - faut pas déconner, il me reste un semblant de dignité.
Mais t'attends pas à de la reconnaissance.
Est-ce que j'ai encore l'air, ce soir, de quelqu'un qui en a quelque chose à foutre de crever ?


Le loup pénètre dans la maison de Dieu à défaut de souiller son entrée du sang, celui des coupables innocents - coupables de tellement de choses dans leurs envies de droiture, leur fantasme du meilleur, qu'ils en peinent à se souvenir pourquoi ils ne se sont jamais contentés d'être de coupables coupables. Pour la différence que ça fait. Pour ce que ça a pu apporter au monde, cette obsession de bien faire. Pour ce que ça a été franchement utile à la société d'avoir voulu lui rendre service.

Vautrée au sol, coulée sous sa capuche, Eloise croit percevoir une invitation à le suivre. Elle hésite, une seconde, sa tige campée entre les lèvres et le regard vide. Se dit qu'elle pourrait tout aussi bien déboîter la porte profanée et la lui écraser sur le corps, se donner les secondes nécessaires et suffisantes à la fuite. Moins par crainte d'être tuée que par flemme à subir encore de la compagnie. Réalise, sur l'expiration d'une fumée opaque, qu'elle se trouve encore moins d'énergie à se débattre qu'à se laisser tout bonnement porter par le courant, même si dans le lit de la rivière se trouve une personne qu'elle préférerait ne pas subir. Arrache sa carcasse au sol dans un grondement morne et lui emboîte le pas, cendres échouées de sa fumante sur le sol sacré, atmosphère divine empuantie par le cancer entre ses lèvres sans qu'elle ne s'en formalise une seule seconde. Sigurd parle, interroge, ouvre un dialogue qui n'en est pas un vers des réflexions qui ne mèneront nulle part. S'en va t'en confesse d'une anecdote de vie ridiculement adorable, comme on palabre au dessus d'une pinte de bière. Existant ou pas, Dieu ouvre assurément les cœurs, sitôt qu'on se trouve à le contempler, de façon bien étrange - par foi militante ou nihilisme total, par cynisme ou par affect, on crache quand même le morceau en contemplant l'autel. Et il lui arrache un sourire, le blondin, le premier peut-être qui ne soit pas gerbe d'écoeurement jaunâtre; dans l'intimité vouée à mourir d'une capuche dissimulatrice. Ca ne t'a rien fait, vraiment ? Pas même le plaisir de braver les interdits ? Cette exaltation puissante de la bêtise, l'adrénaline du môme à faire sa connerie pas grave, sinon peut-être parce que c'est un fait exprès.

Trop fatiguée pour se remémorer le respect, qu'il fût des dieux ou des hommes, Adele écrase son mégot sur les pavés de pierre, en recrache sa dernière agonie sous les voûtes de l'église. " Je gerbais les hosties pour ne pas grossir. " rebondit-elle dans un ronronnement enroué, un murmure que des oreilles humaines trouveraient difficiles à comprendre; de ce même ton de connivences qui ne sont qu'illusoires, puisqu'elle le déteste et qu'il la méprise, ce soir. Dans la vérité partielle toujours, ces exagérations anodines et grossières que l'on fait de sa propre vie, pour épater la galerie. Comme on embellit l'histoire, comme on se persuade une ou deux secondes que notre existence est moins banale que celle des autres. Elle ne l'a fait qu'une fois, en réalité, au plus grave de sa maladie - était hospitalisée le lendemain pour mise en péril vital. Mais il est beau d'accentuer ses vieilles tares, les revendiquer pour arracher à l'autre l'admiration de les avoir effacées.

Elle échoue sur un banc, Eloise, juste au devant de l'autel - se rallume une cigarette aussitôt, seules bouées de sauvetage à sa conscience en dérive. S'attend à tuer le demi paquet qu'il lui reste en un temps record, en cette soirée beaucoup trop mauvaise pour s'émouvoir de sa consommation déplorable. L'église est petite et simple, la lumière pourtant superbe : un rayon de lune enfin décidé à percer les nuages pour en argenter les vieilles voûtes et colorer les modestes vitraux. Une atmosphère solennelle dans laquelle sa fumée s'élève, souillant les icones communes de la vierge parsemées sur les grands murs, les croix du Christ et les tentures.

" Dieu nous concerne plus. Nous on doit déjà être tout en bas de la carte de Botticelli, avec les autres horreurs. elle hasarde, placide, à exposer ses opinions puisqu'on fait semblant de vouloir les entendre. Dans un frisson, Eloise se brûle la gorge à sa tige, efface dans la râpure cette horrible et subite clairvoyance de n'être plus qu'un monstre. Ni par crime ni par morale, ni même après cette soirée catastrophique dont elle saura se relever, au pire dans le dommage de sa propre santé mentale. Juste par nature, seulement par état de fait. Une ridicule, foutue morsure. On t'a jamais violé, Blondin. " elle embraye, rembobine, dans un murmure curieux malgré son absence de force à y mettre l'interrogation nécessaire. Ca pourrait, après tout. Un compagnon de taule un peu trop solitaire, une bande de criminels particulièrement tarés. Ces choses là vont vite, et ne se contentent pas forcément des clichés.

Le remords, il te pénètre les chairs en même temps que le premier coup de trique non désiré et contrairement à celui qui finit par se terminer, lui, il ne s'en va plus. L'éternelle question. La complicité. On pense plus vraiment les choses de la même façon, après avoir dénié pour la première fois, véritablement, son innocence. " J'ai pas besoin de Dieu pour les remords, au moins. J'y arrive très bien toute seule, sans la menace du châtiment divin au dessus de ma tête. La peur n'empêche pas l'issue, pas vrai ? puisqu'on est devenu des monstres, condamnés au purgatoire. Que si Dieu existe, alors on ne peut être que l'œuvre du diable ; on a une place au chaud réservée dans les flammes de l'enfer. C'est quand j'en aurai plus, des remords, que je serai bonne à jeter. Ce jour là, je viendrai te voir, et tu pourras me tuer. En guise de remerciement pour ton incroyable miséricorde. elle ironise, dans un rire redevenu jaune, une gerbe de colère encore présente.  Enfin, ça suppose de ne pas non plus me dénoncer d'ici là. "

Deal ?
Tapote et désigne la place à côté d'elle, sur le banc, Adele. Lui tend une cigarette en guise d'appât, dans un sourire qui se fait plus avenant, plus charmant mais moins profond que les précédents. Reprend corps avec son image, la menteuse - parce qu'il le faut bien, qu'Eloise n'en supportera pas d'avantage. Pas sans devenir folle. Ce soir plus que tous les autres, Adele devient moins un mensonge, qu'une véritable barrière entre ses horreurs et le reste du monde.

" Pourquoi tu fabriques de la drogue ? L'argent ? interroge t'elle quand il daigne la rejoindre, réfutant sa propre hypothèse dans une moue superficielle sitôt qu'elle est émise. De s'être fait violer, elle n'oserait s'avancer à le dire, mais il n'a pas la gueule de l'appât du gain. L'adrénaline peut-être. Ou alors; l'illusion. Celle d'appartenir encore à ce monde. De ne pas être condamné à vivre trop vieux, trop mal, pour qu'il perde tout son sens un jour ou l'autre. Est-ce que tu repousses l'évidence ? se pourrait-il qu'on ait quelque chose en commun ? ... Faudra que tu me raccompagnes, après. C'est important, d'assumer ses propres conneries. C'est une question d'hygiène. "

Lui de ne l'avoir pas tuée, elle de ne l'avoir pas fui.
Quelques heures liés pour le pire et pour le meilleur ; avant de retourner dans l'horreur trop banale de leurs existences.

Adele Croce
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Les charognards [Sigurd] - Ven 23 Fév - 20:34
Sigurd Strøm
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Sigurd Strøm
EFFIGIE : charlie hunnam
BAFOUILLES : 77
PACTE : 19/01/2018
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OSSATURE : 35 années grossièrement gerber sur le faciès, des décennies d'errance difficilement planquées par la pupille abyssale.
CONTRAT : Célibataire
BESOGNE : Toutou du professeur tu as été, toutou du professeur tu resteras... Limier pour l'Opus. Récemment nommé nounou de Jessy
FABLE : Connaissance accrue du surnaturel et des diverses espèces qui le peuplent, le tout, soigneusement enseigné par le Professeur fou des temps modernes.
ÉCHINE : Maudit et assujetti au clairon de la lune.
PRESTIGE : Force décuplé, haute capacité d'analyse, instinct meurtrier poussé à l'extrême, don offert sous le coup des entraînements d'une existence bercée dans le noyau de la pègre et de la violence .
GANG : Allégeance faite, il y'a de là des années, au Professeur.
CREDIT : Avatar / sign"@Adele Croce"
LES CHAROGNARDS

Adèle & Sigurd



Je t’ai testé du coup, tu me testes à ton tour ? Tu veux voir ce que planque mes entrailles? J’espère que t’as pas peur du vide, parce que c’est profondément creux gamine.

Il sent, comme un effleurement dans l’air saturée d’encens, la présence féminine prendre place derrière lui dans un aura de tabac et de ce qu’il perçoit, comme un bref relent de parfum. femme ça se parfume avant d’éventrer quelqu’un ? Elle est silencieuse, un temps. C’est presque nouveau, cette absence de sentiments, cette armistice à la haine. Juste l’entendre respirer, sans trembler,  ni jurer. Il est tenté, un instant, de tourner ses mirettes en coin pour apercevoir sa silhouette, obéir au désir muet. Pas franchement par reconnaissance, ni même par réelle curiosité. Juste parce qu’il y a quelque chose de rassurant dans ce portrait. L’apparente innocence qu’il a eu le privilège de voir s’égrener dans un flash d’émotions convulsives, nullement retenue par cette pudeur brièvement planquer sous un faciès joueur, presque provocateur. Il aire, des yeux, du souffle, comme pour salir, à son tour, les alentours. Un monstre, plus un monstre… Ca fait beaucoup pour dieu. L’avarice du mal, pénétrant les portes du bien. L’obscure destin, se heurtant à l’utopie du bon, du saint. Y’a de l’insolence dans les pas heurtés par les songes, comme une revanche à ses heures passées, interminables, en ces lieux exécrables bon à lui rappeler, incessamment, que sa place est n’importe où, sauf ici.  Il a beau fermé les yeux, impossible de se rappeler, si ses parents priaient. Etaient-ils chrétiens au moins ? Y’a ce corps, fait de l’enlacement de chaires inconnues. De patronymes oubliés. D’origines douteuses qui ont donné un corps trop grand, à l’époque, trop imposant.

Il rouvre les yeux quand la voix faiblement embrumée -probablement par de vague remous d’émotions et de nicotine- vient se heurter à ses pensées. Se rappelle, furtivement, qu’il en a engagé le dialogue, dans le brefs murmure de ses aveux rêveurs. Y’a des mots qui lui viennent, des cases, comme on a l’habitude d’en coller quand on en apprend, un peu plus, ou un peu moins, sur quelqu’un. Gerber c’est anorexique ? Ou boulimie ? Y’a un truc où on se fait gerber, c’est sûr...dans tout les cas, la cause est la même… ? Elle avance, prend place, à une proximité restreinte qu’elle semble avoir elle-même choisi. L’homme la suit des yeux sans bouger de sa stature nonchalante, les mains flanquées dans le fond de ses poches, sa masse retenue vulgairement d’une épaule écrasée contre le pilier dominant. Son regard stoïque, sa posture presque mélancolique. Il a probablement pas plus fier allure qu’elle, malgré ses tâches, malgré ses larmes. P’t’être que je ressemble à ça, moi aussi, de l’intérieur. Même que, si ça se trouve, je suis plus dégueulasse encore, de l’intérieur. Elle a les épaules affaissées, le poids de la honte courbe sa silhouette, la ratatine de son fardeau contre le banc. Semble, lui accorder un semblant de confiance en lui tournant délibérément le dos, laissant libre champs aux yeux acerbes de scruter, attaquer -si jamais. Aucune scène de film, photo retouchée ou extrapolée ne pourrait renvoyer l’image qu’elle projette au blondin. Avec ses cheveux emmêlés, collés par le sang, la sueur peut être, s’évadant partiellement de sa capuche. Sa posture. Elle ressemble à ses patients, affaissés sur le siège du rang des urgences. Le regard craintif et impatient de recevoir le verdict. La pâleur du teint, n’ayant pas besoin de tube néon pour être aggravé. Je t’ai un peu cassé moi aussi ? Au final… tu te serais peut être faite rattraper… peut être même que je t’ai sauvé dans le fond. Dans un fond, profond alors et sans sens. Ou un sens que seul lui peut percevoir, sans vraiment chercher à le distinguer, le temps de s’y attarder disloquant toute crédibilité de la puérile idée, rapidement écartée.

Puis y’a ce -nous-. Non pas lui. Mais eux. Elle tout autant que lui, enrôlés dans le dessin du monstre. Elle le sait, maintenant. Elle qui jauge et apostrophe de mépris un reflet auquel elle s’apprête à se frapper chaque jours, dorénavant. Il siffle, doucement entre ses dents, une satisfaction que son rictus confirme, lentement. Il aurait applaudit, si cette vieille habitude de ne pas faire de bruit entre ses murs ne s’accrochait à sa rétine -comme un vieux souvenir de ceinture mordant le derme, quand la bouche avait le malheur de s’ouvrir pour tout autre sérénade. Un truc mécanique de gosse presque obéissant que de se taire, une fois devant l’autel sacré.

Non, on m’a jamais violé… pas d’un coup de queue, mais on a pénétré mes chaires tout aussi salement, on m’a volé ce que j’aurai dû avoir… une vie. Un permis de vivre, un pass gratuit et approuvé à ces conneries humaines qui me propulsent au rang de spectateur sans me demander mon avis. J’avais pas ça dans le sang, on me l’a injecté, on me l’a imposé. Maintenant j’suis un monstre et je sais rien faire d’autre que d’être un monstre.

-Le jour où je te tuerai, ça s’ra certainement pas parce que tu me l’as demandé, petite.

Qu'il souffle, avec la menace du doute dans le creux de la voix. J’sais même pas si je pourrais te tuer, tu vois ? Pourtant c’pas l’envie qui me manque quand tu t'y mets. Il se redresse en captant la demande, toujours muette, du tapement de la paume contre le bois raide du banc. La clope tendue en sa direction sert de motif valable au déplacement grinçant de la bête. Il s’en saisit d’un geste rapide, comme pour éviter le contact qu’il recherchait, quelques minutes plutôt. S’installe à une distance raisonnable, rencapuchonnant son crâne d’un voile, qu’elle n’a toujours pas daigné lever. Moins désireux qu’elle capte son regard maintenant. Tandis qu’elle préserve cette distance résignée. Une tolérance invisible se trahie, pudiquement dans ses gestes. Une brusque trouille de la solitude, peut être ? Une peur rationnelle -vue le contexte- de se retrouver face à soi-même précocement, sûrement. Dans l’évidence qu’il est réconfortant d’avoir pire que soi à ses côtés. Histoire de se décharger un peu de la crasse du miroir.

-Ca me permet de me fournir un matos précis dont j’ai besoin pour… avancer. Puis, crois le ou non, c’est…

Le mot en italien bute contre sa langue. Fait se froncer les sourcils et brusquement se rembrunir les rides creusant le faciès. Il hait la langue, il hait ce pays et là, tout cet écœurement le fait passer pour un con. La bête soupire avant de balayer son temps de réflexion en allumant rageusement sa clope. En expulse un torrent de fumée hors de ses narines fulminantes. Trivelig...hyggelig... -plaisant, agréable*-.

-Différent de rencontrer autres choses que des cadavres.  

Parce que parfois, j’oublie ma voix, j’en viens à n’plus savoir me servir de ma langue, c’est pas le genre de muscle que j’entraine le plus souvent... Tu m’suis ? Non. Tu m’suivrais pas… Ca m’étonne pas, qu’est-ce qui t’y comprendrais toi ? C’est beau que tes problèmes s’arrêtent à un viole… T’avais quoi de si précieux entre tes jambes pour en arriver là ? Moi j’ai rien à perdre, rien à chialer. Rien qu’un truc que j’aurai jamais et que j’connais même pas, dans le fond. Toi ta dignité, tu la retrouveras probablement pas dans une pochette surprise, mais au moins, t’as une chance de la retrouver… Pas vrai ?

-Je…

Il grogne, tire plus nerveusement encore sur sa clope. Sa cramant les doigts de la combustion rageuse quand il réalise pourquoi il l'ouvre jamais, pourquoi il aime pas parler. Parce qu'il en dit trop, toujours. Ou pas assez. Souvent.

- J’ai un devoir...tu peux rire, te foutre de ma gueule, mais c’est probablement la seule chose qui me fasse avancer, même si ça veut dire répandre la peste noire partout sur mon passage. Je crois pas en dieu, mais j'pense croire en quelqu'un, en une porte de sortie à toute cette merde... et ça demande du temps et un pieds à terre dans le milieu.  

Pour vendre, pour dissimuler un possible remède consommé par toutes les espèces mais sauvera surtout la sienne. L'image du Professeur s'impose à son esprit. Ses tableaux verts, comme on en voit plus. Un autre temps. Le temps des gribouillis -indéchiffrables. Le temps où l'espoir vrombissait dans ses entrailles à l'unissons des ambitions du savant. Sachant tout, sur tout. Lui inculquant des bases, puis des accès à la chimie qu'il n'aurait jamais soupçonner acquérir. Le traitant autrement que comme le cabot, qu'il était devenu, pour lui. Guidé par autre chose qu'un souvenir, s'effaçant au rythme du temps.  Ca le frappe en pleine face et se remercie de garder sa trogne vainement dissimulée. Propulse son mégot à la gueule du Christ qui semble le zieuter à travers l'inclinaison de sa trogne. Clôturant sèchement le sujet.

-Tu poses beaucoup de questions. Ca t'intéresse de savoir comment on devient comme moi ? Pourquoi je suis comme ça ? Pourquoi je fabrique de la came alors que j'ai pas besoin d'fric ?

Il détourne, enfin, le visage dans sa direction. Se remet impunément à fouiller ses iris. L'ombre d'un sourire, presque amusé, gravant des fossettes insoupçonnées. Comme pour lui permettre, à son tour, de fouiller, décortiquer ce que sa langue n'arrive à expulser.

-Moi j'veux d'abord savoir comment une p'tite fille de bonne famille comme toi, a fini par devenir indic... médiocre en plus de ça.

Le sujet se détourne lentement de lui, de l'instant pénible de devoir articuler, parler. Sa cheville vient se heurter mollement à son genoux dans le croisement de ses jambes, alors que ses bras s'étalent sur le dossier dans l'assurance légère d'avoir rempli sa part du contrat, sa part d'aveux.

-J'te raccompagnerai mais compte pas sur moi pour te border.


MR. CHAOTIK


Sigurd Strøm
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Les charognards [Sigurd] - Mar 27 Fév - 22:32
Adele Croce
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Adele Croce
EFFIGIE : Saoirse Ronan
BAFOUILLES : 1246
PACTE : 30/11/2017
OSSATURE : 28 ans
CONTRAT : Célibataire, mariée à son métier, indisponibilité temporaire pour descente dans le tunnel de la drogue. C'est Alice au pays des merveilles avec des flingues.
BESOGNE : Dealer/Rabatteur (Agent du GOA infiltré)
FABLE : Adele sait tout ce qu'il y a à savoir des meutes et comment les éviter. Elle a de faibles notions sur l'existence des sorciers. Renifle et fuit les suceurs de sang avec efficacité. Des sirènes ? Faut quand même pas exagérer.
ÉCHINE : Wolfman (la version originale, bien entendu. Rien ne vaut les classiques)
PRESTIGE : Faiblarde pour les alphas, Hulk pour les humains. L'odorat d'une femme enceinte et la médaille d'or au quatre cents mètres haie. Au bas de l'alphabet grec et de la chaîne alimentaire, Adele n'est pas plus épaisse qu'un gros chien (bon d'accord, un très gros chien) Poule pondeuse pour sa race, c'est sympa les omegas. T'as raté quelques pages de l'histoire du féminisme, Dame Nature.
GANG : Nostro Regno. Tant qu'on gagne, on joue.
CREDIT : ava by me / sign by lazare
.Les Charognards.



Tu te trompes, Blondin. Tu te racontes des mensonges et tu te berces avec. Je te juge pas parce que t'es un monstre, un loup, un semeur de peste noire ou un assassin. Je te juge pas parce que t'es d'une race incomprise et voilée d'un mystère cassé par les épreuves, rassemblé en Picasso par la laideur splendide de l'existence. Parce que t'es digne d'un Baudelaire dans les dilemmes atroces et putréfiés auxquels la vie te confronte, qu'il y a une espèce de beauté cachée dans le fait de dévorer l'autre par avidité de lui, de le consommer pour ne pas dépérir de haine, se sauver soi-même dans l'intérêt éphémère et poétique de sa souffrance.
Je te juge parce que t'es un connard.
Etre maudit ne condamne pas se conduire comme un salaud ; se faire mordre n'a jamais rendu quelqu'un plus con. Ca va faire quinze ans que je dévore mes tripes de famine dans la chambre froide d'un abattoir pour m'en tenir à ma morale, alors je sais de quoi je parle. Je sais que c'est possible, je sais que l'enfer qui m'attend j'aurais au moins essayé de pas le mériter.  Je sais que je suis pas un monstre et toi non plus - je suis juste une pauvre idiote et toi un connard. Je sais que j'ai pas besoin de foutus prétextes pour m'excuser des actes impardonnables. Tout ça, c'est comme Dieu, c'est des histoires pour enfants, pour mieux dormir le soir. C'est le Croquemitaine le coupable de nos malheurs et c'est bien pratique, ça veut dire qu'on n'est pas coupable. Que si on le tue tout s'arrêtera - mais c'est pas comme ça que ça marche, et tu vas crever de désespoir si c'est encore à ça que tu te raccroches.
Au final on est responsable de ses actes, et on n'est jugé que par eux. Y a pas de monstre sous le lit ou de petite voix dans nos têtes, y a que nous et les choix qui nous portent.

C'est quand même foutrement culotté de traiter une fille qui prétend s'être fait violer de cette manière et puis invoquer dieu - ou Satan ou la bienséance ou encore les cons - parce qu'elle a l'audace de pas nous mésestimer ensuite.
Alors assume, Blondin.
A défaut de t'excuser, ça te rendra plus agréable à vivre.


Monsieur clôt le chapitre des menaces par une dernière envolée, n'invoquant plus même un haussement d'épaule chez la rouquine, qui s'obstine à ne pas lui dire que tout ça ne sert à rien, qu'il gaspille sa salive et n'impressionne pas grand monde. Que les fiers à bras ne sont pas tellement à son goût, ce soir, que ça lui donnerait plutôt envie de le tabasser à son tour que de courir se cacher, ce genre d'attitude. Elle fume, Eloise - ses dilemmes et ses horreurs, ses déboires et ses mensonges - s'étonne en silence de le voir faire preuve de tant de réserves, lui qui n'hésitait pas à violer son espace vital quelques minutes auparavant. A croire que ça devient moins drôle, quand le jouet se met à répondre. Sans doute que ç'aurait été plus confortable pour lui, si elle s'était contentée de rester dans son mutisme et son malheur, sa détresse friable et passive. Mais c'est bien toi qui m'a secouée, non ? Un paradoxe qu'elle ne relèvera pas, moins intrusive que le bulldozer assis à côté d'elle - et qui prête à sourire, quand on connaît un peu Adele ; quand on sait qu'il est bien difficile de trouver moins subtil et plus intrusif qu'elle. Un autre jour, dans une autre vie, c'est elle qui serait venue le trouver pour lui casser les murs protecteurs et confortables de sa souffrance, remuer les différents couteaux pour obtenir une réaction. Par ennui. Par nouvelle habitude. Par obsession constante et destructrice de trouver de l'humanité dans les salopards, des excuses aux criminels. Cette lubie dont elle ne se lasse plus et qu'elle aurait peut-être bien poussée plus loin que lui, avec ses armes propres. Dans un sourire, une moquerie, de sarcasme en cynisme.

Mais il se dévoile, le teuton, rappelle dans toutes les choses qui s'entrechoquent ce soir, la barrière de la langue sur laquelle on peut encore cogner leurs réflexes aberrants de communication, leurs problèmes de pudeur incisive et leur agressivité par défaut. Elle le sent s'énerver de frustration sur le banc, avant de larguer un mot qui ne doit pas être le bon - se retient de lui proposer de parler en anglais, consciente d'en avoir déjà trop dit ce soir. Ecrase son mégot du bout de la semelle pour lui laisser l'intimité de finir, sans renverser l'autel sous le coup de la colère. Des cadavres ? charmant. L'hypothèse du tueur en série, du pervers, se raffermit. Dans un sourcil brièvement secoué, Eloise regrette de ne pas avoir l'énergie de creuser - comme une flic, comme on enquête sur des propos suspects - mais renonce à cette idée avant même de l'avoir formulée. De toute façon, elle n'est même plus sûre de vouloir être flic, ce soir. Elle n'est plus sûre de vouloir être rien. Rien qu'un gros sac qu'on balancerait dans le premier train. Alors elle le laisse poursuivre ses discours étranges, dans le tranchant métallique et militaire de son accent natal ; débiter des lubies bien au delà du voyeurisme, des ambitions à demi prononcées qu'elle ne comprend pas tellement. Mais est-ce que c'est vraiment important ? D'un geste morne, Adele tire sur sa capuche, libère son périmètre pour s'arracher une oeillade à son adresse : lui qui se recueille en silence, dans la cachette chaude de ses propres vêtements, cabane infantile recousue en chapeau par quelque commercial habile. C'est presque dommage, qu'il se cache de cette manière - sous la capuche ou même la hargne avec lequel il souille le visage du Christ, comme pour l'embraser. Parce qu'il pourrait presque être charmant, dans son recueil elle en est sûr. Beau, quand il pense. A autre chose qu'à l'asséner de commentaires inutiles.

Mais ce voyeur là est un voyeur pudique, il ne daigne lui rendre son regard que quand il lui renvoie la balle de ses questions, dans une moquerie défensive et désagréable. Elle sourit, Adele, récupère le rôle du moins incisif des deux. Elle qui avait de bonnes raisons de se défendre et qui maintenant, n'en a tout bonnement plus l'énergie. Quitte à subir la compagnie de l'autre, autant s'y intéresser tu vois ; sinon j'aurais vraiment passé la pire des soirées.

« Médiocre ? rebondit-elle, l'insolente, dans un rire enroué mais sincère. Un éclat de malice au coin des lippes, quand elle y enfourne la tige suivante, l'embrase sans se soucier de son cancer.  Putain c'est l'hôpital qui se fout de la charité; monsieur j'ai un devoir mais pas trop vite je dois aller emmerder les filles ;  je répands la peste mais je te tuerai pas ce soir. »

Elle rit, Adele, l'espace d'une seconde - entre complice et moqueuse, elle rit pour combattre la dépression, repousser quelques instants ses envies de crever séance tenante, si ça peut lui permettre de dormir - diable elle ne sait pas quand ni comment elle pourra un jour dormir. Largue le paquet de cigarettes pratiquement terminé, complètement éventré entre eux, pour éviter à monsieur l'horreur d'un contact qui ne semble plus lui convenir. Ce qui expliquerait le manque flagrant de correction et de stratégie dans l'abord, de la plus petite once de décence d'ailleurs.

« Je m'intéresse, Blondin, c'est tout. mais moi, je t'intéresse pas Je devrais presque être vexée. J'ai pourtant tout donné, dans l'héroïne shakespearienne mystérieuse et déchirante, tu crois pas ? qu'est ce qui te faut de plus. Je connais un paquet de moins tarés que toi qui seraient déjà amoureux, à l'heure qu'il est. Un murmure largué du bout des lèvres, presque ramenée à sa tendresse habituelle. Cette mutinerie perpétuelle et douce qui flatte l'ego des hommes, apaise l'inquiétude des femmes, et peut vendre plus de drogue. Et peut-être, dans la colère et le mépris, une envie désavouée de sauter à l'étape de la vraie tendresse, ce soir. Par évidente absence d'énergie à se battre encore. C’est toi qui m’as traînée là, je te rappelle. croit-elle bon de préciser, de ne pas faire oublier pourquoi ils en sont là, ce soir. Pourquoi elle doit se fendre d'un putain d'interrogatoire, et de manières effarouchées quand elle s'emploie à lui donner la réplique. Profite, va. C'est quand la dernière fois qu'on s'est intéressé à toi ? Vraiment, je veux dire. Personne ne s'intéresse jamais vraiment à personne. Alors t'es gentil, si tu veux pas me laisser tranquille, laisse-moi au moins mes putains d'instant de grâce, merde. Si c’est pas pour que je m’intéresse, c’est pour quoi alors ? Pour remplir tes quotas d’emmerdeur ? »  

Un soupir. Exaltation de fumante, dont Adele s'empare pour considérer la question - et son envie réelle d'y répondre. Ses épaules se haussent, dans une reddition passive aux aveux, même s'ils ne sont arrachés que pour la moquerie ignorante, la gratuité des conclusions hâtives et stupides dont il parvient à faire preuve, en un temps record.

« J'ai été mordue. elle explique, simplement, Eloise, dans un sourire un peu plus profond, un peu moins facile. Une gerbe de réminiscence douloureuse encore au fond de la gorge. Le dessin des corps fusillé et la douleur des lacérations à chaque pleine lune. La vie ruinée, famille détruire - tout le tintouin. J'étais une gamine malheureuse et seule. On me voyait morte - du coup, je rentabilise. Au prix que j’ai payé mon instinct de survie, je me sens un peu obligée d’investir, tu vois. Mais t'as raison, je suis probablement médiocre : je me serais pas fait choper sinon.

Elle accueille, dans un rire mutin, les déclarations renfrognées de l'autre, pour y répondre avec un aplomb honorable dans sa détresse, une propension farouche et de plus en plus inscrite à l'insolence. Je suis sûre que t'en rêves. En plus, je suis adorable quand je dors. elle roucoule, rauque, dans une moue puérile à son adresse, Adele, avant de consumer encore un peu de papier dans une bouffée pleine Tu me diras un truc alors, pour m'endormir. Un autre truc. Un truc que t'as jamais dit à personne. Tu me dois bien ça, je t'ai offert mon meurtre, je te signale. »
Adele Croce
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